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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
En dehors du grand intérêt pour vous de cette matière exceptionnelle, que vous soyez jeune parent, chercheur dans une université ou simplement intéressé par l'évolution des comportements humains, votre soutien par l'intermédiaire d'un abonnement nous est indispensable.
Pour les pays lointains et si vous ne désirez pas profiter de la version papier, un abonnement sous forme de pdf est accessible au même prix annuel de CHF 30. Il vous donne un accès complet aux archives
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Le plus humble présent

L'étable est très pauvre, pleine de trous et de courants d'air, avec des poutres qui s'effondrent et de vieilles crèches pourries. Et c'est justement à cause d'un de ces trous dans le toit, que tout le monde a commencé.
- Il y a une lumière étrange sur ton dos, Boeuf, remarque l'Ane qui observe tout. Une lumière qui n'y est pas d'habitude.
- Vraiment, réplique le Boeuf. Ça ne me plaît qu'à moitié. Il est quelque peu tatillon et n'apprécie pas les changements.
- La paille ressemble à de l'or! dit la vieille Mère Brebis.
- Ça se mange, l'or? interroge le petit Agneau de dix jours à peine. - Non, mon fils, le vrai or ça ne se mange pas.
- Et je ne comprends pas pourquoi les hommes en font alors un si grand cas, dit l'Ane, qui est un sage.
- Mais c'est joli, cette paille brillante! dit Souriceau, furetant partout comme toujours.
- N'empêche, reprend le Boeuf, je serais curieux de savoir d'où provient cette lumière qui nous dérange.
- C'est une étoile, dit timidement l'Araignée. Elle se balance à un fil suspendu à la poutre faîtière, tout près de l'ouverture dans le toit. C'est une modeste Araignée grise, qui ne parle pas souvent et se tient un peu à l'écart. Cette clarté nouvelle lui plaît, car elle la vêt d'une carapace d'argent.
L'Ane et le Boeuf s'esclaffent.
- Allons donc, dit Bourricot, voilà des années que je vis dans cette étable, et je n'ai jamais vu d'étoile à cet endroit-là!
- Et d'abord, ma pauvre araignée, ajoute le Boeuf, une étoile ne donne jamais une telle lumière. J'en ai les yeux qui clignotent: c'est pénible.
- Mais c'est une étoile! dit Agnelet, innocent et émerveillé, son tendre museau rose levé vers le trou dans le toit.
- Elle est plus grande et plus brillante que toutes celles que j'ai vues! renchérit Mère Brebis. Et je m'y connais, moi, après tant d'années passées dehors.
- C'est pourtant vrai! dit à son tour Souriceau, trottinant de-ci de-là. Il y a là-haut une belle grande étoile arrêtée dans sa course!
A cet instant, la porte délabrée de l'étable s'ouvre. Trois silhouettes se découpent contre le ciel illuminé de la nuit.
- Voilà, mettez-vous ici, la paille est changée de ce matin: c'est tout ce que je peux vous offrir! dit la voix du maître de l'étable.
- Merci, l'aubergiste, nous sommes tellement fatigués et ma femme se sent si peu bien, c'est une chance de pouvoir coucher ici, puisqu'il n'y a de place nulle part ailleurs!
- Allez, poussez-vous un peu, gros pansus! dit encore l'hôtelier en donnant une bourrade au boeuf et au bourricot. Puis il sort de l'étable. L'homme déploie son manteau sur la paille et la femme s'y étend. Les animaux se taisent, tout engourdis de sommeil. Un grand silence envahit l'étable. L'étoile brille intensément à travers le toit crevé.
Soudain, un faible bruit, inconnu jusqu'à ce jour dans la masure se fait entendre: plainte? rire tremblé? roucoulement plus doux que celui de la Colombe? On ne saurait dire.
Agnelet ouvre un oeil. - Oh, oh, oh! dit-il étonné.
Car, à côté de la jeune femme, repose à présent un tout petit enfant. Sa maman l'emmaillotte dans un linge blanc. Puis cherche où le coucher.
- Ici! dit Agnelet, en désignant de la tête la moins abîmée des crèches. Et il se lève afin que le père du petit puisse prendre la paille toute propre sur laquelle il était couché. Les autres animaux s'éveillent à leur tour, grandement surpris de ce qui arrive, mais tout attendris de voir naître chez eux ce petit enfant. Il repose au creux de la vieille crèche. La clarté de l'étoile tombe sur lui. Et même, étrangement, on dirait qu'elle vient de lui.
Le bébé gémit un peu. Aussitôt, les animaux sont bouleversés.
- Il a faim, dit Mère Brebis, voici mon lait.
- Il a froid, sans doute, avec ces courants d'air, dit Bourricot. Viens compère Boeuf, mettons-nous de chaque côté de lui: nos corps le réchaufferont!
- Il aimerait jouer! dit Souriceau. Et il s'installe dans la crèche, glissant sa douce fourrure sous la main du bébé.
-Je lui ai déjà donné la paille de ma litière, je n'ai plus rien d'autre, soupire Agnelet.
L'Araignée ne souffle mot. Elle se tient toujours là-haut, au faîte du toit. Elle y a construit sa maison de soie qui paraît toute en argent cette nuit-là.
- Que puis-je offrir? pense-t-elle. Je n'ai rien pour l'aider, rien pour lui. Que faire?…
Elle voit à ce moment le minuscule doigt du bébé pointé vers son lumineux château. L'enfant rit, avec de grosses bulles de salive qui éclatent sur ses lèvres douces. Alors l'Araignée quitte sa retraite enchantée dans la clarté de l'étoile. Elle redevient l'humble Araignée grise. Et, d'un bond à l'autre de la crèche, elle se met à tendre ses fils légers au-dessus du petit enfant.
- Oh! la dégoûtante! s'indigne le Boeuf, va donc fabriquer ailleurs ta vilaine toile!
- Quel toupet! dit l'Ane.
- Arrête, stupide Araignée! Je vais m'engluer le museau dans ton filet! crie Souriceau.
- Voyons, ma Commère, reproche Mère Brebis, tu pourrais choisir un autre endroit!
- Mais je crois qu'il aime ça! dit Agnelet, montrant le petit enfant qui rit aux anges en regardant le va-et-vient de l'araignée. Et voyez comme c'est joli maintenant!
En effet, les rayons de l'étoile éclairent les fils tendus par l'Araignée. Le bébé semble abrité sous une fine dentelle de soie et d'argent.
- Quelle chose ravissante! dit doucement sa mère. Tellement ravissante qu'on la verra toujours, jusqu'à la fin des temps: dès aujourd'hui, gentille Araignée, les fils que tu tends entre les herbes et sur les buissons brilleront de cette même clarté. Ils rappelleront à jamais cette nuit où tu tissas pour mon Fils la plus fine, la plus soyeuse des couvertures.
Ainsi dit la Vierge Marie.
Et c'est pourquoi les fils qui scintillent au matin dans la rosée, ou le soir, au clair de lune, s'appellent encore les fils de la Vierge.









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