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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
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RETOURLa personnalité de nos enfants (1) Pour bien remplir leur tâche, il importe que les parents placent à la base de leur travail éducatif le respect de la personnalité de leurs enfants. Nos enfants ne sont pas des êtres neutres qui nous seraient livrés pour être façonnés par nous à notre gré, selon nos idées, en vue d'un but déterminé arbitrairement par nous. Ce sont des êtres vivants; ils naissent contenant déjà en eux-mêmes des germes multiples, susceptibles de se développer, des éléments du caractère, bons, mauvais, indifférents, un tempérament physique et moral dans la constitution duquel l'hérédité et d'autres causes sont entrées. Tout cela constitue leur personnalité. Cette personnalité leur est propre; elle est différente de celle de leurs frères et soeurs, différente de celle des autres hommes, différente de la nôtre. Il importe donc de les prendre comme tels et d'aborder le contact éducatif avec eux en nous dépouillant d'idées et de plans préconçus. Nous ne sommes pas chargés de créer leur personnalité, elle existe, nous n'avons qu'à en diriger le développement. A ce fait s'en ajoute un autre: Dieu, en donnant la vie à nos enfants, leur destine une certaine carrière, un certain rôle dans l'humanité que lui seul connaît, qu'il ne nous apartient pas de déterminer, et que nous devons chercher à discerner. A l'origine et au terme de notre tâche éducative il y a donc des circonstances qui sont en dehors de notre action, et il importe que d'emblée nous nous placions dans la situation de parents qui ne sont pas appelés à remplacer Dieu, mais à être ouvriers avec Lui. Cette position initiale, prise intérieurement, nous placera dans la bonne ligne: elle nous éclairera sur les meilleures méthodes. Elle nous évitera des fautes et des déceptions, celle entr'autres qui nous attendrait, si nous pensions que nos enfants doivent nous ressembler, être faits sur le même patron que nous-mêmes, ou passer nécessairement par la même filière morale. Elle nous dépouillera comme parents de tout élément égoïste ou personnel, de tout but intéressé. Notre premier devoir est de respecter la personnalité de nos enfants. I. Nécessité de bien connaître nos enfants Pour la respecter, il faut d'abord la connaître. Nous devons donc nous appliquer à observer à mesure qu'ils se manifestent les traits divers de cette personnalité. Deux sources de connaissance sont à notre portée: regarder et écouter. Il faut beaucoup écouter nos enfants: dans l'éducation la maxime « beaucoup écouter, peu parler» trouve sa place légitime. Certains parents imposent volontiers silence à leurs enfants (à table par exemple) et compriment parfois ainsi les élans de leur nature; ce peut être plus commode mais c'est se priver d'une lumière. Si nous voulons connaître nos enfants, laissons-les se montrer eux-mêmes tels qu'ils sont; cela n'aura lieu que s'il ne se sentent pas gênés en notre présence. Accordons-leur dans ce but la liberté physique et morale de la parole, ne fermons pas leurs lèvres par une discipline trop rigoureuse, prenons garde aussi de les amener par notre attitude générale à nous taire leurs idées ou leurs sentiments. Sans doute nous ne pouvons rien forcer; il y a des natures renfermées qui ne s'ouvrent pas; les parents de semblables enfants ne parviennent pas à les connaître, et ils en souffrent. Mais que cette ignorance ne vienne pas de notre faute: craignons par dessus tout de les rendre nous-mêmes renfermés; dépouillons-nous de la mauvaise humeur qui leur préparerait de notre part un accueil réfrigérant et les détournerait de nous au moment où ils désireraient s'épancher, de l'esprit autoritaire qui veut avant tout faire plier les autres sous son joug et n'admet pas les obstacles; dussent leurs idées nous déplaire, leurs paradoxes nous froisser, n'en comprimons pas la libre expression pour la satisfaction de n'être pas contredits nous-mêmes. Laissons respirer leur coeur dans une atmosphère de tendresse et leur esprit dans une atmosphère de liberté. Nous permettrons ainsi à leur personnalité de s'épanouir normalement et nous la verrons échapper au double écueil de s'étioler sous le joug ou de se soustraire à notre influence en se développant dans le secret d'une réserve voulue. Quelle triste chose pour nous, si d'autres arrivaient à connaître nos enfants mieux que nous, et si plus tard nous découvrions tel besoin, telle souffrance, telle aspiration auxquels il n'a pas été répondu, parce que nous les ignorions, tel germe qui s'est développé à notre insu et sans notre intervention parce que nous ne nous étions pas mis dans la situation de le découvrir! Pour bien connaître nos enfants, il importe de les voir dans différentes situations. Isolé de ses frères et soeurs, un enfant peut parfois se montrer sous un jour nouveau à ses parents et révéler telles qualités, tel trait de caractère qui demeuraient cachés dans le brouhaha de la vie de famille; la personnalité d'un cadet ou d'une soeur moins douée peut être étouffée par celle plus marquée des aînés; telle fleur se ferme au contact de l'air ambiant ou des souffles du dehors qui s'épanouira dans une atmosphère plus chaude et plus calme. Sans doute on ne modifie pas à son gré les circonstances de la vie; si elles nous procurent l'occasion d'être plus rapproché pendant un temps d'un de nos enfants, saisissons-la pour mieux pénétrer dans son intimité; sachons aussi y suppléer en profitant des temps de maladie, des facilités d'une promenade, pour étudier à part ceux que les relations quotidiennes ne nous présentent pas toujours sous leur vrai jour. (A suivre.) (1) Cet article a été rédigé d'après un travail préparé par l'auteur pour une «réunion de mères» en réponse à diverses questions. |
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