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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
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RETOURLa personnalité de nos enfants II. Intervention des parents Cette personnalité une fois connue (et cette étude n'est pas d'un jour) avons-nous à la laisser se développer librement ou à intervenir ? question toute résolue d'avance, semble-t-il. Il y a cependant des chrétiens qui par principe pensent inutile de chercher à agir sur leurs enfants avant que la grâce de Dieu les ait convertis. Les faits sont nombreux qui montrent les dangers et l'erreur de ce principe. Sans nous y arrêter, observons que si selon la théorie de Rousseau l'homme naissait bon, on pourrait l'abandonner à lui-même; mais il ne naît pas bon, des tendances mauvaises se font rapidement jour dans sa nature; sa personnalité est parfois incomplète ou incomplètement équilibrée; elle est inévitablement exposée à une foule d'influences diverses. Abandonnerons-nous nos enfants à ces influences en les privant de la nôtre? Enfin ils ne sont pas seuls et dans une famille il faut parfois protéger la personnalité des uns contre les empiètements de celle des autres. Nous avons donné la vie, nous n'en négligerons pas la croissance. Notre position de parents, notre autorité, notre expérience plus grande de la vie, notre connaissance plus exacte de nos enfants que la leur propre, notre amour même pour leur personnalité et le rôle auquel elle est appelée dans le monde, nous font de l'intervention, un devoir et un droit. Mais s'il ne nous dispense pas d'intervenir, le respect de la personnalité de nos enfants nous dirige dans le mode de cette intervention. Ce mode variera selon les âges: il y a l'intervention de l'autorité: il y a celle de la persuasion et de l'influence. L'autorité précède: absolue dans le premier âge, elle doit petit à petit céder la place à la persuasion. Combinée pendant une phrase, la substitution de l'une à l'autre est délicate et dépend du caractère des enfants, de celui des parents, des circonstances de la famille, du milieu général. Il faut préparer cette substitution en gagnant l'entière confiance de l'enfant, en lui laissant voir que nous ne tenons pas à l'autorité pour elle-même, mais qu'aussitôt qu'il aura acquis le principe intérieur de la direction personelle nous saurons nous retirer. Par toute notre manière de faire nous lui inspirerons la conviction que dans son éducation nous n'agissons jamais d'après un caprice arbitraire mais par des motifs raisonnés; nous lui expliquerons ces motifs à l'occasion, même alors que nous userons néanmoins de l'autorité; surtout nous n'agirons jamais que d'après des motifs qui se légitimeront plus tard à sa conscience; il faut que s'il nous dit un jour: «je regrette d'avoir dû suivre ce chemin», il soit forcé d'ajouter: vous ne pouviez faire autrement que de me le faire suivre. Une condition essentielle de notre influence sera que l'enfant se sente compris dans tout ce qui se légitime à sa conscience et qu'il ne trouve chez ses parents de fin de non recevoir que pour ce qui est mauvais en soi. En le mettant en garde contre les écueils, nous veillerons donc à appeler mal ce qui est mal et bien ce qui est bien, mais nous nous garderons d'appeler coupable ce qui est indifférent; nous pouvons avoir été amenés à faire pour nous-mêmes le sacrifice de telle chose légitime devenue illégitime pour nous mais prenons garde d'imposer ce sacrifice à ceux dont le développement spirituel est moindre. Nous ne repousserons pas tel goût ou telle occupation innocente en eux-mêmes parce qu'il peut en résulter du mal, mais nous distinguerons soigneusement avec notre enfant l'acte en lui-même du caractère immoral qu'il peut revêtir par suite de circonstance indépendantes; sinon nous risquerions de fausser le sens moral de notre enfant. Nous nous rappellerons aussi que le moyen de développer une personnalité féconde chez nos enfants, n'est pas de comprimer la nature, mais de l'épanouir en la dirigeant. Notre fils ou notre fille a tel goût, artistique par exemple, que nous ne ressentons pas, que nous comprenons même imparfaitement : c'est une lacune chez nous, non chez lui: ne le comprimons pas. L'ambition, l'esprit d'émulation se manifestent dans son caractère; nous en voyons surtout les conséquences fâcheuses; nous sommes tentés de réprimer ces dispositions; pourquoi ? appliquées à des objets élevés, elles ne sont point mauvaises, elles peuvent devenir des forces motrices produisant d'heureux fruits: dirigeons-les vers de tels objets et ne mutilons pas notre enfant. On connait la réponse de ce sculpteur de génie qu'un ami s'étonnait de voir en contemplation devant un bloc de pierre informe; «Je vois d'avance, dit-il, la statue qui pourrait en sortir.» C'est ainsi que d'avance nous chercherons à discerner ce que la personnalité de notre enfant est susceptible de devenir, et alors la voulant aussi complète que possible, nous développerons en elle tout élément capable d'en augmenter la valeur; nous ne porterons pas notre effort uniquement sur la faculté intellectuelle et morale prédominante, mais, imitant les professeurs qui obligent leurs élèves à s'exercer dans tous les genres et non pas seulement dans celui où ils obtiennent un facile succès, nous poursuivrons un développement harmonique et complet de la personnalité. D'un autre côté nous nous rendrons compte soit des limites de cette personnalité, soit de ce qu'elle a de spécial, et nous ne viserons pas à son égard, par fausse ambition, ou par routine de méthode à un résultat auquel il n'est pas possible d'arriver: tel enfant qui est revêche à certaine filière pédagogique, peut dans une autre direction parvenir à fournir une carrière distinguée. C'est dans le choix de leur vocation qu'il importe surtout d'avoir égard à cela. (A suivre). |
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