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L'âge ingrat

Il est un âge qu'on appelle «l'âge ingrat» et qu'on pourrait peut-être appeler plus justement «l'âge imcompris». D'ailleurs, en se rangeant eux-mêmes dans la catégorie des « incompris», ceux de cet âge n'ont pas tout à fait tort. A une condition cependant, c'est qu'ils sachent reconnaitre qu'ils ne se comprennent pas toujours eux-mêmes.
L'enfant de douze à quatorze ans est à coup sûr de caractère difficile. D'où vient cela?
D'abord de ce qu'il commence à ne plus pouvoir supporter la discipline familiale. Jusque-là cette discipline s'était imposée à lui sans trop lui peser, mais vers treize ans l'enfant commence à se sentir une personnalité, personnalité peu développée et très vague, mais en tout cas personnalité qui se cherche. D'où le besoin de liberté et d'indépendance, car c'est bien par le sentiment de la liberté que la personne humaine commence à s'affirmer.
Ce fait va obliger l'éducateur à employer des méthodes nouvelles. Mais qu'on n'en veuille pas à l'enfant d'un développement naturel, si pénible qu'il puisse paraître à un certain nombre de mamans. Il ne s'agit plus de faire obéir l'enfant comme par le passé, mais bien d'orienter les puissances nouvelles qui commencent à l'agiter. L'esprit d'obéissance et l'esprit d'indépendance se heurtent violemment et provoquent des sentiments contradictoires. Fini le temps ou l'enfant déclarait une chose bonne ou mauvaise parce que tel était l'avis de sa mère. Il cherche maintenant le sens du bien et du mal à travers sa propre conscience et ses propres jugements. C'est pourquoi il juge et critique tout.
Il commence par juger ceux qui l'entourent, sans épargner son père et sa mère. Sans prendre le temps d'examiner les choses, il les déclare bonnes ou mauvaises d'un ton péremptoire qui exclut le doute et repousse la critique. Peut-être ne prend-il un ton aussi tranchant que pour se donner un air de grande personne, alors qu'il garde au fond un vague sentiment de faiblesse et d'ignorance ? Cette période sera le crucifiement des parents, parce qu'ils vont passer au crible de l'impitoyable jugement de leur enfant. Ce jugement est préparé de longue date par des impressions et des intuitions qui se sont lentement formées dans son esprit et le plus souvent à son insu. Mais quand une fois le jugement est porté, il est absolu et définitif. Puisse-t-il être favorable et naître du sentiment que ses parents lui sont infiniment supérieurs et animés de hautes préoccupations morales. S'il découvre chez eux des défauts positifs son âme est triste et déçue. Cette déception détournait l'affection de l'enfant de ses parents et le porterait à en chercher de nouvelles, n'importe lesquelles pour suppléer à l'insuffisance de celle qu'il aurait dû normalement porter à sa famille. Qu'elle est le remède à ce besoin de juger, sinon la formation d'un milieu sain et moral qui influencera l'enfant sans même qu'il s'en doute? A treize ans son jugement peut encore être dirigé. S'il fréquente à l'école ou au lycée des enfants de toutes sortes et qu'il jouisse, de ce fait, d'une certaine liberté dans le choix de ses amis, il n'en reste pas moins que les parents peuvent aider à ce choix en ne recevant chez eux que des amis d'une moralité éprouvée. Mais le choix des amis ne suffit pas. Il importe que les grandes personnes que l'enfant rencontre au foyer soient également choisies. Malgré son besoin de juger, il est profondément influencé par ce qu'il voit et entend. S'il admet difficilement l'autorité, il subit la fascination des êtres supérieurs. Le besoin d'admirer se substitue à l'obligation d'obéir. Et c'est très naturel si nous admettons que le sentiment de l'admiration est un mélange de liberté et de soumission. Liberté, puisque l'on choisit l'objet de son admiration; soumission, puisque l'esprit abdique devant une supériorité qui fascine.
Il est donc de la plus haute importance de guider ce besoin d'admiration qui me paraît être une des caractéristiques les plus importantes de l'âge ingrat. S'il est abandonné à lui-même, l'enfant admirera-t-il n'importe qui, et nous verrons ses puissances d'enthousiame se porter, par exemple, vers un boxeur, au lieu de se reporter sur des êtres d'une moralité supérieure. Ne laissez jamais les sceptiques et les blasés s'approcher de lui ; pour peu qu'il les trouve intelligents et d'esprit caustique, votre fils adoptera leur scepticisme et leur dégoût de la vie. Vous lui enlèverez par là tout ressort moral. L'idéal serait que le besoin d'admiration se portât naturellement vers les parents. Quand il en est ainsi l'enfant est garanti contre les déviations du sens moral et contre les fréquentations dangereuses.
Le problème de l'autorité en face des adolescents est des plus délicats. Si l'autorité continue à commander comme par le passé, elle exaspère et énerve. Il faut qu'elle emploie avec habileté une méthode nouvelle, celle de la suggestion. Le commandement pur et simple ne vaut que pour les tout-petits. Dès que l'enfant grandit, l'autorité doit faire appel à sa conscience et à son intelligence. Cela demande du tact et de l'habileté. Cette suggestion sera singulièrement facilitée si elle se fait à propos des responsabilités que vous confierez à vos enfants. Car c'est en leur confiant des responsabilités chaque jour plus importantes que l'on forme leur conscience. Continuer à traiter comme un enfant un grand garçon c'est arrêter net le développement de sa personnalité morale. Il faut multiplier les responsabilités et donner aux jeunes confiance en leur propre valeur. Je ne sais si vos enfants sont des turbulents, de ceux qu'on semble disqualifier en les appelant des « meneurs » et qui ne sont ordinairement que des caractères actifs qui ont besoin d'organiser des jeux, de conduire des troupes à la bataille, voire de mener un «chahut». S'ils appartiennent à cette catégorie, je serais tenté de vous en féliciter. C'est signe qu'ils ont en réserve des énergies. A vous de les guider pour qu'ils ne s'égarent pas. Ils auront des tentations nombreuses, parce qu'ils ont une personnalité accentuée; mais pour peu que vous sachiez fournir un aliment à leur besoin d'activité, ils seront un jour des vainqueurs de la vie et des puissances morales.
Je ne puis indiquer le genre de responsabilités qu'il convient de confier à vos enfants. Elles varient suivant les circonstances. Mais, croyez-moi, ne craignez pas de partager avec eux vos soucis, vos aspirations, vos souffrances et vos joies. Demandez-leur services réels et non des services pour rire. Qu'ils en viennent à comprendre que leur activité personnelle est nécessaire à la famille, que l'on compte vraiment et loyalement sur eux pour former à conscience d'un frère ou d'un ami plus jeune. Confiez-leur le soin d'organiser des réunions, de veiller à la bonne entente et à la bonne tenue de tous.
Cette question des responsabilités est d'une importance capitale. C'est en confiant des responsabilités à l'enfant que l'on peut, sans lui être à charge, surveiller le développement de sa conscience morale. L'enfant accepte qu'on le conseille à propos des tâches qu'on lui confie, et qu'on l'aide à voir pourquoi il n'a pas pleinement réussi dans tel cas déterminé. Ne craignez pas de lui confier des tâches un peu difficiles et dont la réussite n'est pas assurée. Cela l'obligera à tendre davantage ses facultés et permettra d'autant plus facilement votre intervention et vos conseils qu'il aura un sentiment plus vif de la difficulté. Il s'établira ainsi entre lui et vous une collaboration efficace, qui aidera puissamment à l'union des cÅ“urs et des volontés.
Enfin j'estime que s'il est un âge où les émotions religieuses soient nécessaires, c'est celui de la première adolescence. A l'âge où l'enfant prétend prendre ses responsabilités d'homme, il est nécessaire de capter toutes ses puissances morales en vue d'un acte libre et volontaire. Il ne dominera les puissances contradictoires qui l'agitent qu'à la condition de prendre conscience des plus hautes responsabilités de la vie. Comment prendre conscience de sa propre valeur sinon par l'intermédiaire d'un puissant idéal religieux? Le moment est venu de le traiter comme une grande personne, et c'est pourquoi l'Eglise lui pose solennellement la question grave entre toutes : « Voulez-vous être un chrétien conscient de ses responsabilités et de ses devoirs? » Cette question doit avoir pour effet d'éveiller chez lui le sens de sa dignité et de sa valeur morale et faire naître en lui un amour-propre légitime, celui de vaincre sa faiblesse en raison de la grandeur de sa vocation de chrétien. La tentation d'indépendance va faire place à la volonté de faire le bien, et l'autorité pourra s'effacer tous les jours davantage devant les énergies morales qui cherchent à s'affirmer.









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