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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
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Le sens du beau dans l'éducation

La vie actuelle est dominée par l'idée de vitesse de la course à pied jusqu'au raid d'avion, tout est record ; même dans la journée d'une famille, aller vite est une préoccupation perpétuelle : on va vite en métro ou en taxi, on va vite d'un travail pressé à une distraction qui, le plus souvent, est une course effrénée de photos sur l'écran; les repas sont écourtés et se passent le plus souvent dans le bruit des informations et des concerts de la T. S. F., ou de la sonnerie impérative du téléphone. En auto, on brûle sites et monuments pour atteindre un point aussi éloigné que possible. On n'a même plus le temps de parler français, et les parents supportent… quand ils ne donnent pas l'exemple, qu'il soit question du caté, de géo, de bus, etc. Tout est extérieur, agité; nous abusons des trésors que sont le téléphone, le cinéma, l'auto, la T.S.F., bientôt la télévision, parce qu'ils diminuent l'effort personnel, et nous risquons de dérégler dangereusement la vie de nos enfants.

De toute évidence un antidote s'impose; c'est, à notre avis, le sens du Beau, la faculté de regarder, d'admirer, de former en soi de belles images et de chercher à les reproduire : nous avons nommé l'art.

Il ne s'agit pas d'imposer à l'enfant un travail supplémentaire, ni d'en faire un petit prodige, mais de lui ouvrir un royaume enchanté, de lui donner une force de joie qui le soutiendra toute sa vie, de développer en lui la vraie sensibilité, que foule trop souvent aux pieds notre société énervée et prosaïque; il s'agit de le mettre en contact avec tout ce qui est beau.

Les jeunes mères qui liront ces lignes vont penser : « C'est une utopie ! » Je voudrais, pour leur prouver le contraire, leur montrer trois mignons personnages de cinq, six et huit ans, penchés sur la soucoupe où, d'un peu de coton mouillé, surgissent triomphalement les cotylédons pansus d'un haricot et les tiges effilées de quelques lentilles; ils trépignent de joie et s'écrient : « Que C'est joli, tout cela ! » Tout cela, c'est la vie de la nature entière montant vers le soleil…

Je voudrais encore redire le mot charmant d'une enfant de six ans que sa mère avait menée au Louvre. L'escalier de la Victoire de Samothrace offrit à la jeune visiteuse un siège commode d'où elle contempla le chef-d'Å“uvre. Quand au bout d'un moment sa mère voulut l'emmener: « Non, répondit-elle, je veux voir encore. »

Ceci est tout un programme qui demande seulement que l'éducatrice vibre elle-même à toute beauté. L'enfant ne sait pas encore que le monde a besoin d'art pour vivre, mais il peut admirer la splendeur de la création, reflet de la splendeur de Dieu.

Le pouvoir d'admirer est peut-être le secret du bonheur ; bien dirigé, il forme des âmes riches d'enthousiasme qui portent en elles-mêmes leurs ressources et rayonnent, comme le soleil brille, pour la joie des autres. L'enfant admire avec confiance ce qu'on lui montre de beau, et aussitôt naît en lui le désir de reproduire ce qu'il a aimé; si humble, si minuscule que soit le résultat de son effort, il se sent créateur et par là goûte une joie très vive.









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