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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
En dehors du grand intérêt pour vous de cette matière exceptionnelle, que vous soyez jeune parent, chercheur dans une université ou simplement intéressé par l'évolution des comportements humains, votre soutien par l'intermédiaire d'un abonnement nous est indispensable. Pour les pays lointains et si vous ne désirez pas profiter de la version papier, un abonnement sous forme de pdf est accessible au même prix annuel de CHF 30. Il vous donne un accès complet aux archives
RETOURChaque chose a deux faces Il est un certain jeu de société, venu de l'autre côté de l'Atlantique, qui est jugé d'une façon très différente par tous ceux qui le connaissent. Il s'appelle "monopoly". C'est un jeu où capitaux, privilèges, biens fonciers, sont acquis ou perdus à… coups de dé, avec possibilité aussi de tomber en prison ou d'échouer au sanatorium. Ce jeu passionne petits et grands ; il paraît même que des joueurs (et des gens très sérieux !) arrivent à y passer une partie de leurs nuits afin de pouvoir pousser les combinaisons jusqu'au bout. "Jeu effrayant, jeu inquiétant, disent certains, loin de nous et de nos enfants un jeu pareil qui représente trop bien la cynique réalité de notre civilisation vouée à Mammon !" Je me suis posée à moi-même la question lorsque ce jeu nous fut donné il y a quelques mois. Devions-nous vertueusement le mettre tout de suite au pilori et l'interdire chez nous afin de ne pas provoquer ou exciter des passions que la vie se chargera trop bien de faire naître en nos enfants? Après réflexion, nous avons conclu tout autrement: si ce jeu est effrayant parce qu'il représente la réalité, si d'autre part il est inquiétant à cause de l'écho qu'il trouve dans le coeur de nos jeunes, raison de plus pour saisir cette occasion unique de voir comment ils réagissent devant les tentations du gain, du risque ou de la ruse pour mettre dedans un adversaire plus naïf qu'eux, et pour cela jouons-le avec eux. Je me souviens de la première partie qui nous révéla tout l'attrait de ce jeu. Le grand carton sur lequel on joue avait été installé au milieu de la chambre et toute la famille s'était groupée autour, le père y compris. Peu à peu furent découvertes les finesses et les malices du jeu et chacun de s'y engager à fond, ou prudemment, ou timidement, selon son caractère. Au bout d'un moment il y avait déjà des ruinés par imprudence ou par manque d'initiative, un endetté par générosité, parce qu'il avait trop prêté à ses voisins, un petit rentier sans histoire et enfin un gros capitaliste entassant ses revenus au détriment des autres. Et les langues de marcher, les réflexions de s'exprimer, les sentiments de se manifester. Spectacle très instructif pour les parents qui d'un mot ont pu rectifier des jugements, diriger l'opinion et mettre en garde contre une habileté touchant à la malhonnêteté. Bref, à la fin de la partie, nous nous connaissions vraiment mieux, et plus encore, quelques grands principes d'honneur et de loyauté avaient pu être posés, sans en avoir l'air, comme une semence vivante qui deviendrait moisson plus tard. Je crois qu'il en peut être ainsi avec tous les jeux de société, depuis le croquet dont les maillets sont devenus parfois de terribles armes de bataille entre les mains de joueurs passionnés, jusqu'aux jeux de cartes, sévèrement jugés par beaucoup, en passant par le domino qui, quoique d'allure si pacifique, arrive à mettre en colère, par dépit de perdre, de bien vénérables personnes, m'a-t-on dit. Tous ces jeux ont deux faces: la bonne et la mauvaise; comme ils constituent un champ d'activité nécessaire, recherché d'instinct par nos enfants, ne les prohibons pas, mais utilisons-les pour une fin utile et bonne. Seulement, cela demandera de notre part un petit sacrifice : celui de jouer de temps en temps avec eux pour ne pas les laisser s'égarer sur de fausses pistes, celles du dépit, de la colère, de la rancune, ou de l'écrasement du naïf par le malin. J'écris ces lignes, et voici qu'il faut que je vous fasse une confession: avant de devenir le sage mentor qui conduit les jeunes vers les charmes supérieurs du " fair play" je sens que je dois moi-même apprendre et réapprendre sans cesse le contrôle de mes sentiments et de mes impressions. Si les jeux de la vie me mettent trop souvent sens-dessus-dessous, les jeux de mes enfants le font aussi, à leur échelle, quand je m'y associe. Hum! C'est grave tout cela ! Mais non car, après tout, je serai à l'école sur cette terre jusqu'au bout du voyage, je le sais bien, et je ne pourrai jamais dire à mes jeunes « faites comme moi ! » mais bien plutôt : « apprenons ensemble à faire chaque jour de mieux en mieux! » |
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