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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
En dehors du grand intérêt pour vous de cette matière exceptionnelle, que vous soyez jeune parent, chercheur dans une université ou simplement intéressé par l'évolution des comportements humains, votre soutien par l'intermédiaire d'un abonnement nous est indispensable. Pour les pays lointains et si vous ne désirez pas profiter de la version papier, un abonnement sous forme de pdf est accessible au même prix annuel de CHF 30. Il vous donne un accès complet aux archives
RETOUR"Je vais d'abord faire un bout de chemin avec lui" En achevant la lecture de l'admirable dernier chapitre du livre de Saint-Exupéry, «Terre des hommes», je me disais : « oui, vraiment, une des pires cruautés dans ce monde est d'empêcher un homme de s'exprimer lui-même en le maintenant dans une vie médiocre et sans horizon, qui efface peu à peu de sa personnalité toute trace originale et spontanée », et j'ajoutais en moi-même « et pour nous, parents, une des plus graves erreurs en éducation est d'empêcher un enfant de se trouver lui-même ; c'est de vouloir lui imposer nos idées, nos jugements, notre conception de la foi, sans nous soucier de l'aider à trouver son chemin, sa vérité, celle qui le fera vivre. » Un jour un de nos amis devait avoir une conversation sérieuse et peut-être décisive avec un jeune garçon qui semblait s'égarer sur une mauvaise voie. Avant d'aborder cet entretien, il me dit : « Je vais d'abord faire un bout de chemin avec lui», ce qui signifiait je ne veux pas le révolter d'emblée par un jugement sommaire qui balaierait avec dédain ses idées fausses; je vais d'abord essayer de le comprendre, pénétrer les motifs de son attitude et de ses opinions, rechercher ce qui, dans tout cela, est sa marque, son lui-même, et dépister ce qui est emprunté à un milieu ou aux circonstances, et alors seulement je pourrai l'aider. Faire un bout de chemin avec lui, ce sera d'abord gagner sa confiance, puis, quand il aura reconnu mon amour, mon désintéressement et, j'espère, mort objectivité, alors il lui sera possible de reconnaître son erreur, et je pourrai le conduire peu à peu sur une voie meilleure. Cette phrase m'est restée : je veux d'abord faire un bout de chemin avec lui, comme l'expression non seulement de beaucoup d'amour, mais aussi de beaucoup de sagesse. Quand mon enfant vient à moi la tête pleine d'une idée, d'un désir brûlant ou d'un projet qui me paraissent inutiles, prématurés ou faux, je ne dois pas opposer tout de suite mon ennuyeuse raison à sa fougue juvénile ; je ferai d'abord un bout de chemin avec lui, je lui demanderai de me faire connaître plus en détail, son idée, son désir ou son projet, m'y intéresserai, j'essaierai de le partager en me mettant à sa place, - et puis, si je ne peux décidément pas y souscrire, je m'efforcerai tranquillement, patiemment, de le conduire sur un autre chemin, vers un autre point de vue, mais sans rien comprimer des battements de son coeur, sans arrêter par une maladroite rebuffade, le précieux élan de cette jeune vie, et surtout c'est en me servant de ses matériaux frais et jeunes, et non pas en lui prêtant les miens, que je m'offrirai à l'aider à construire sa vie, à faire un autre projet, à trouver une autre idée. Et ainsi il ne se détournera pas de moi. -Vous souvenez-vous avec quelle reconnaissance nous avions accueilli le secours de ce guide de fortune dont le chemin avait heureusement croisé le nôtre, un jour que nous nous égarions dans la montagne ? Simplement il avait consenti à abandonner sa course pour faire route avec nous jusqu'à un point d'où nous pouvions nous retrouver, puis il nous avait quittés, nos buts n'étant pas les mêmes, mais nous n'avions plus peur car nous étions de nouveau sur la bonne voie. Les chemins de nos enfants et les nôtres ne sont pas identiques; nous pouvons cheminer ensemble souvent, mais pas toujours, et surtout notre marche et la leur ne se ressemblent pas. Mais comme ils nous aiment, nos enfants, quand nous avons compris cet appétit de vivre qui les fait échafauder mille plans dans leurs journées, qui les pousse à entreprendre tant de choses que, nous le savons, ils n'achèveront pas. Ces feux d'artifice perpétuels, dont l'éclat éphémère inquiète notre marche prudente et mesurée, ce n'est pas du gaspillage de force, ce n'est pas un mauvais apprentissage de vie, ce sont les étincelles premières d'un brasier qui s'allume et dont la flamme un jour réchauffera notre vieux coeur. Oui, faisons un bout de chemin avec eux, et puis, quand ils seront bien en marche, laissons-les écouter dans le silence l'appel secret et s'élancer, seuls, vers la destinée où Dieu les attend. |
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