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« Le sonneur de paix »

La mort de Baden-Powell est un deuil personnel - je crois que ce n'est pas trop dire - pour plusieurs millions de jeunes garçons et de jeunes filles, et pour beaucoup d'hommes et de femmes d'âge mûr pour lesquels les heures qu'ils ont passées sous l'uniforme kaki restent parmi les plus belles de leur vie. Comment, dans ces Entretiens sur l'Education, ne commémorait-on pas le décès du plus grand, incontestablement, des éducateurs de ce temps?

Pasteur ne fut jamais docteur en médecine, Baden Powell ne fut jamais maître d'école. Mais comme la médecine a été renouvelée par l'un, on peut espérer que la pédagogie sera un jour orientée par l'autre dans des voies toutes nouvelles. Pour l'instant nous n'en sommes pas là. Beaucoup de ceux qui ont le plus évidemment profité de ses inventions, en Russie, en Italie, en Allemagne, l'ont fait en altérant aussi complètement qu'il était possible, l'inspiration initiale du scoutisme.

Car il faut dans le mouvement créé par Baden-Powell distinguer trois choses : les techniques de l’Organisation, - les voies d'approche (c'est ce que veut dire le mot « méthodes ») psychologiques - et l'inspiration profonde, qui ne se sépare pas du but qu'il visait lui-même.

1. L'organisation, c'est la patrouille, le petit groupe avec son chef responsable; la troupe, avec l'instructeur auquel on recommande de ne pas viser à étendre démesurément son action ; c'est la façon dont instructeurs et chefs sont choisis pour des qualités auxquelles jamais on n'avait su attribuer cette importance ; c'est l'insigne qui incite à apprendre, car il ne s'acquiert qu'en prouvant qu'on savait faire quelque chose ; c'est l'uniforme qui fait disparaître les différences sociales ; c'est l'émulation non pas d'individu à individu, mais de troupe à troupe, qui développe, non la rivalité, mais la solidarité. Ce sont là des «inventions» pédagogiques de haute valeur mais indépendantes de l'inspiration du scoutisme.

2. La méthode, Baden-Powell l'a décrite lui-même en ces termes : « Quand vous essayez d'amener des garçons sous une bonne influence, je vous trouve pareil à un pêcheur qui voudrait prendre du poisson. Si vous mettez à votre hameçon le genre de nourriture que vous aimez vous-même, il est probable que vous ne prendrez pas grand chose. Choisissez comme appât la nourriture qui est du goût des poissons. De même pour les jeunes garçons ».- Cela suppose que l'on connaît les goûts des garçons. Baden-Powell les connaissait admirablement.

Il a commencé par s'occuper de ceux de 11 à 15 ans (les Eclaireurs), puis il a pris en main les plus jeunes, de 8 à 11 (les Louveteaux), puis les aînés qui sont en train de devenir des hommes. Et son génie - je n'ai pas peur du mot - est apparu dans toute sa grandeur quand (après qu'une dame eût tenté une adaptation du programme primitif des Eclaireurs aux jeunes filles, sans réussir à en faire autre chose qu'une caricature), quand cet homme, qui était resté plus de cinquante ans célibataire, entreprit de mettre en valeur les traits distinctifs de la psychologie féminine.
Sa connaissance des jeunes le conduit, sans qu'il ait lu ni Groos, sur les jeux des animaux, ni Claparède, à la conclusion qui fut celle du grand psychologue genevois disparu peu de mois avant lui : « Le jeu est le premier et le grand éducateur». Le scoutisme tout entier est un jeu. La vie elle-même est le plus grand des jeux. On ne peut le jouer sans en connaître les règles. Et la grande règle, c'est celle-là même que Claparède appelle la probité. Cela se dit en anglais, d'un mot que Baden-Powell affectionne et que tout le monde comprend: le fair play. « Jouez franc jeu » « Play the game ».

Dans un jeu, on ne peut faire abstraction des tendances naturelles, des goûts instinctifs de l'homme, à commencer par ce goût de l'aventure et de la lutte, mais sans oublier celui de l'entr'aide, qui donnera leur zeste aux B. A. quotidiennes. Mais un éducateur s'appliquera et réussira à tirer parti de tendances mêmes dangereuses pour les canaliser et, comme on dit, les sublimer.

3. Le but? Le sous-titre du livre de Baden-Powell: « Un programme d'éducation civique » le définit bien. Ce vieux colonial a été, en rentrant dans la métropole, atterré de constater le laisser-aller, le goût du confort, la crainte que chacun paraît avoir de se donner de la peine, la limitation de l'horizon de tous ces gamins de grande ville. Il dresse la liste de ces défauts, celle des vertus à acquérir et, entre ces deux listes de mots abstraits, il aligne les activités très définies que le scoutisme propose aux éducateurs désireux de former des caractères, des hommes de devoir, sur lesquels le pays pourra compter.

Et, presque sans qu'il s'en doute d'abord, son idéal dépasse le cadre, vaste déjà, de l'Empire britannique. C'est que, malgré cet appel à l'instinct combatif du jeune garçon, le nom d'Eclaireur n'a pas de signification militaire. « Nous n'avons pas l'intention de faire de nos garçons des soldats, ni de les assoiffer de sang ». Ces déclarations si nettes de son premier livre, le vieux général les a accentuées à mesure que son mouvement se développait d'une édition à l'autre, les faits de guerre, même ceux où des scouts jouaient un beau rôle, sont graduellement éliminés. Sa volonté de servir la paix de tout son pouvoir est manifeste. Elle tint une grande place dans le dernier Jamboree auquel il prit part en Hollande. A Genève, en 1922, au IIIème Congrès international d'Education morale, le premier depuis la guerre, Baden-Powell présenta son système sous ce beau titre: «L'éducation par l'amour au lieu de l'éducation par la crainte». « Il faut un nouvel esprit dans le monde. La présente situation de l'Europe risque de faire durer le militarisme. Il faut remplacer l'éducation militaire par autre chose. Comment une nation peut-elle rester virile sans le militarisme ? » tels furent les principaux sous-titres de son discours. « Et ne pensez pas, nous disait-il, jeter le discrédit sur mes propositions en rappelant que j'ai été un soldat. En voudriez-vous à un cheval de cavalerie, réformé pour son grand âge, de chercher encore à se rendre utile en employant ses dernières forces à amuser des enfants dans un cirque? »

Le sourire de Baden-Powell! Le rire est essentiel. (C'est lui qui souligne). « Dans l'éducation des Eclaireurs, nous avons plaidé pour que l'on considérât le sourire comme un assaisonnement indispensable. Quand il s'agit de Louveteaux, le sourire doit être un rire. Le rire va à l'encontre de la plupart des défauts des petits, il va avec la bonne camaraderie et la franchise. Un garçon qui rit beaucoup ment peu ».

L'humour tient une grande place dans ses livres, dans le texte et dans les dessins, qui sont de lui aussi. On oublie plus quand on les a vues croquées par Baden-Powell, les deux grenouilles malencontreusement tombées dans une jatte de crème: l'une s'est laissée couler à pic et gît morte déjà, mais l'autre s'est si obstinément débattue que… la crème s'est changée en beurre, offrant désormais aux pattes de la grenouille le bloc solide d'où elle pourra prendre son élan.
Nous ne saurions trop recommander aux parents de lire du Baden-Powell. Dans chacun de ses livres (Eclaireurs, Eclaireuses, Louveteaux), le dernier chapitre est plus particulièrement destiné aux adultes. C'est la meilleure étude psychologique et pédagogique que nous ayons sur les enfants de 8 à 16 ans. Et c'est plus amusant qu'un traité d'éducation.

L'homme qui a raconté aux enfants qu'il aimait des histoires qui les ont tous fait rêver de l'Afrique est mort à Nyeri dans le Kenia. Nous souhaitons qu'on l'y laisse reposer. Le ramener de là-bas, comme Livingstone, pour l'enterrer à Westminster, ce serait oublier qu'il nous appartient un peu à tous.









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