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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
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RETOUROublier Quelle chose étrange que la mémoire! Pourquoi des événements importants ne laissent-ils parfois aucune trace dans l'esprit des enfants, tandis que des incidents, insignifiants en apparence, se gravent dans leur mémoire en traits indélébiles? Mystère sur lequel les psychologues n'ont pas fini de se pencher… La faculté d'oublier (malgré les tours qu'elle nous joue quelquefois) est d'ailleurs précieuse. Que deviendrait notre pauvre cerveau s'il devait conserver indéfiniment l'empreinte de tout ce qu'il enregistre au cours d'une seule journée ? Mais nous serions tentés de souhaiter que cette faculté fut placée sous le contrôle de notre volonté consciente. Ne serait-ce pas très agréable de pouvoir choisir les faits, les images dont nous désirerions conserver le souvenir et oublier tout ce qui nous est importun (à commencer par nos fautes, nos erreurs, nos manquements de tout genre)? Supposons que nous puissions effacer délibérément de notre souvenir toutes les expériences pénibles que nous avons faites et ne nous rappeler que les choses agréables… Ainsi, quand nous regarderions en arrière, nous tournerions les pages d'un album qui ne contiendrait que des images lumineuses. Quelle idée charmante - et combien fausse ! -cela nous donnerait de la vie !… Il est des natures scrupuleuses, timorées, portées à s'exagérer leurs torts et tourmentées par le remords. A celles-là on voudrait pouvoir dire : « Oubliez ! ». Aux êtres plus superficiels, enclins à retomber dans les mêmes fautes, malgré de cuisantes expériences, s'adresserait le conseil opposé: « Souviens-toi! » Certaines gens tiennent un compte rigoureux de tous les torts - réels ou imaginaires - qu'on a eus à leur égard. Ils peuvent vous raconter avec une précision de détails inouïe des scènes qui se sont passées il y a vingt ou trente ans. Tel geste, telle parole, les ont blessés si profondément que la plaie est à vif comme si elle datait d'hier… Si vous les exhortez au pardon, ils vous répondront: « Je puis bien pardonner » - ou même: «je l'ai fait » - mais il n'est pas en mon pouvoir d'oublier. « Sans doute, mais nous pourrions du moins nous abstenir de nous remémorer avec complaisance ces fâcheux souvenirs, de nous appesantir sur nos griefs, de nous rouler dans les épines, comme le dit T. Combe dans son style imagé. Surtout, nous devrions nous interdire absolument de raconter à qui que ce soit les fautes dont on s'est rendu coupable envers nous. Si nous adoptons résolument cette attitude, l'oubli bienfaisant finira par venir… » « Mon âme, bénis l'Eternel », dit le Psalmiste, et n'oublie aucun de ses bienfaits ». Quel thème serait plus propice à nos méditations en cette fin d'année? Ces grâces, si nombreuses que, si nous essayons d'en faire le compte, nous n'y parviendrons pas, Dieu nous les accorde souvent par l'intermédiaire de notre prochain. Si nous savions ouvrir nos yeux - et nos coeurs - nous verrions que bien peu de journées se passent sans que nous soyons l'objet d'une marque de bienveillance: que ce soit le geste courtois d'un inconnu nous cédant sa place dans le tramway, la complaisance d'une jeune fille nous aidant à porter un paquet trop lourd, le sourire d'un enfant, l'acte d'honnêteté d'un commerçant nous signalant une erreur commise à son profit, la lettre d'un ami, la sympathie qu'on nous témoigne au sujet d'un souci, etc., etc. Que de fleurs s'ouvrent ainsi au bord du chemin où nous sommes parfois portés à voir surtout les épines. Nous rappeler les bienfaits de Dieu, ne serait-ce pas le meilleur moyen d'oublier les méfaits des hommes? |
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