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Réflexions sur la timidité

Marcelle est une fillette menue et un peu délicate. Elle se sent bien faible en présence de son frère cadet, robuste garçon, et de sa soeur aînée. Un rien la fait sursauter, et pourtant elle n'est pas peureuse : toute seule elle est capable de traverser de nuit le jardin plein d'ombre et de mystère. Dès qu'on lui adresse vivement la parole, elle rougit ; le moindre reproche lui met des larmes dans les yeux ; réciter une leçon devant toute la classe est une rude épreuve. Elle aime la musique, interprète avec adresse et délicatesse des oeuvres à sa portée, mais il faut qu'elle soit seule. Saluer les amis de ses parents, causer avec des oncles et tantes, jouer avec des cousins ou cousines qu'elle voit rarement sont autant de menus supplices. Tout le monde dit : elle est timide.

Julien, lui, est un enfant d'humeur inégale. Il est souvent brusque et maladroit. Il choisit le moment où son maître et ses parents sont le plus occupés pour venir les déranger. Il se plaint avec véhémence de l'injustice des autres. Effectivement, si dans la classe une sottise est commise en groupe, c'est toujours lui qui sera pris. Il ne sait pas freiner au bon moment son exubérance. Il « fanfaronne » volontiers, surtout devant les autres enfants. On peut très bien lui appliquer les paroles de Gilbert Robin : « Le silence est toujours brisé. La maison retentit de cris et de claironnements. » La turbulence est souvent l'expression sonore de la maladresse… elle (la turbulence) marche de pair avec des rodomontades. Elle prouve un besoin morbide de s'exprimer, de se faire remarquer. Ce sont souvent des timides qui agissent ainsi, ou des enfants atteints de tares organiques, quand il ne s'agit pas d'enfants blessés dans leur amour-propre.

Voilà deux tableaux bien différents. En parlant du comportement de ces deux enfants on leur attribue le qualificatif « timide » et pourtant, à première vue cela paraît impossible. Pas tant que cela.

Quels sentiments sont à l'origine du comportement de Marcelle? Avant tout, un sentiment d'infériorité. Depuis sa petite enfance, elle a senti son frère et sa soeur plus forts et plus brillants qu'elle. Ils sont plus adroits, moins nerveux et surtout moins sensibles. Devant elle, les parents, sans penser à mal, ont raconté avec fierté certains exploits des deux autres enfants. Ils les mettent en avant, leur font réciter une poésie, exécuter un exercice de gymnastique devant des amis en visite. De plus en plus Marcelle est persuadée qu'elle ne peut rien faire de semblable. Comme ses parents sont ennuyés de son peu de courage et de sa maladresse, ils s'habituent à la laisser de côté. Sa timidité, de ce fait, basée sur son hypersensibilité, d'une part, et son sentiment d'infériorité, de l'autre, ne fera qu'empirer. Rien ne vient briser ce cercle vicieux.
Il n'est pas nécessaire d'avoir des frères et soeurs pour être timide. L'enfant très sensible peut éprouver ce sentiment d'infériorité au contact des adultes. Il compare alors, bien à tort, la faiblesse et la maladresse inhérentes à son âge, à la force et l'adresse des grandes personnes.

Quant à Julien, Gilbert Robin nous le dit, il veut compenser son sentiment d'infériorité. Il ne veut pas qu'on s'aperçoive de sa timidité. Cependant ce sentiment est en lui. Pour arriver à le cacher, il doit faire un tel effort, qu'il inhibe la faculté de contrôler ses actes. Une fois lancé, il ne sait pas s'arrêter. Aux yeux de tous, il paraît le contraire de ce qu'il est réellement.

Comment éviter que nos enfants ne deviennent des timides ?

Premièrement il faut faire attention de ne pas dire devant eux : « J'étais ou je suis si timide.., c'est de nouveau ma sotte timidité qui m'a empêché de faire ceci ou cela ». Le petit enfant aime et admire ses parents par dessus tout. Il les prend comme modèle, et pour lui la timidité même devient une qualité.

Secondement, ayons le courage de braver l'opinion de certaines personnes qui nous taxeront volontiers d'orgueilleux et reconnaissons honnêtement les qualités de nos enfants. Rendons-les conscients de leur valeur. Ne leur donnons pas le sentiment qu'ils sont une exception, mais bien la notion qu'ils ont reçu un véritable don qu'ils doivent utiliser pour eux et pour les autres. A ce moment les imperfections qu'ils sentiront en eux ou que nous leur montrerons, ne leur seront plus intolérables. N'ont-ils pas la certitude que, sur un point au moins, ils sont parmi les privilégiés ? Ils lutteront d'autant mieux pour s'améliorer qu'ils ne seront pas écrasés par leur sentiment d'infériorité. Ils ne chercheront pas non plus à compenser ce sentiment en devenant bruyants et hâbleurs, désagréables à leur entourage, ou en faisant des efforts, parfois nuisibles à leur santé, pour être à tout prix premier en classe ou dans une compétition sportive.

Vous aurez alors des enfants qui donnent l'impression d'être â l'aise, « bien dans leur peau » si j'ose employer cette image. Quand on leur adresse la parole, ils répondent aisément, simplement. Ils n'éprouvent pas le désir d'attirer l'attention. Au milieu d'autres enfants, on les distingue grâce à leur attitude naturelle, parfois vive, mais bien adaptée, exempte de nervosité et d'excitation de mauvais aloi.

Si nous avons autour de nous des enfants timides, rassurons-les, cherchons leurs qualités et efforçons-nous de les en rendre conscients.

Une fillette de sept ans, exagérément timide, a commencé à prendre confiance en elle le jour où un médecin qui surveillait une leçon de gymnastique fit à haute voix, devant elle, la réflexion qu'elle avait un temps de réaction excessivement rapide. Il ajouta que peu d'enfants et même d'adultes étaient capables de réagir aussi promptement à un ordre. C'est à partir de cet instant, qu'à l'étonnement de ses parents, elle devint de moins en moins timide. Ce fut beaucoup plus tard qu'elle put leur expliquer le retentissement immense, dans sa vie, de cette remarque du médecin.

Un maître d'école racontait :.Quand j'ai dans ma classe un élève bruyant, hâbleur, et dérangeant chacun, je m'efforce de lui trouver une supériorité, d'en faire la remarque devant toute la classe, et de lui donner une responsabilité s'appuyant sur cette supériorité, si infime soit-elle. Je suis à peu près certain qu'après cela l'enfant cessera ses manières désagréables. Il donnait comme exemple un enfant qui sautait plus loin que ses camarades.

Il est très important de lutter de bonne heure contre la timidité. Elle se corrige rarement spontanément, et devient de plus en plus un handicap dans la vie. Maine de Birau, philosophe français du XIXme siècle, décrit admirablement la timidité de l'adulte en parlant de lui-même. Nous trouvons dans ses Pensées : « Quand je suis dans le monde ou commandé par les affaires ou les devoirs de ma place, je me laisse préoccuper par les plus petites choses, je me crée des fantômes et des embarras de rien.
Dois-je faire une visite à la cour ou à un grand personnage, je me préoccupe de la dignité des personnes que je dois voir, de la manière dont elles me recevront, et j'arrive avec un air timide et décontenancé.
Faut-il parler au public, je me préoccupe et m'inquiète d'avance de mon défaut de mémoire ou de la faiblesse de mon organe, des regards qui se tourneront vers moi, et mes moyens sont paralysés dans l'instant où il faudrait les employer. Je ne me trouve jamais assez prêt pour parler, agir ou écrire; et, soit dans le monde, soit dans la solitude, un sentiment intime de méfiance, joint à l'idée exagérée des difficultés des choses les plus simples que je vais entreprendre font que j'hésite sur tout… »

Mettons tout en oeuvre pour éviter à nos enfants de semblables expériences.









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