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Camps d'internés civils de guerre. (Croquis d'enfants)

Un rectangle ensoleillé de 2 m sur 3, petites chaises et petites tables, jouets, poupées et gravures, c'est un jardin d'enfants en miniature au camp de L… J'admire et je m'amuse à regarder ce royaume de fées. « Miss Arnold, que faire ? Voyez cette toute petite chambre, c'est toute la place dont nous disposons et dix-huit enfants devraient maintenant fréquenter notre jardin d'enfants : nous avons dû instituer des équipes (ici encore, c'est presque comme à l'usine). Imaginez ces petits bonshommes hauts comme ça, frappant à la porte et qui disent : « May I come in » et il faut dire non. N'est-ce pas cruel ?

J'imagine cela très bien, je vois ces trois petits Hawaïens, tout noirs, tout frisés, arrivés de Hollande avec leur maman l'autre jour, suçant leur pouce et essayant de baragouiner l'anglais.

C'est un vieux château quelque part, entouré non pas d'un fossé séculaire, mais d'une moderne haie de gros barbelés datant du récent séjour de prisonniers de guerre. Derrière ces barbelés, au soleil de mars, jouent des enfants étonnamment blonds et roses qui vous crient « Good morning » dès qu'ils vous voient. Tout au long de la visite, dans les escaliers, dans les corridors et dans toutes les salles, partout surgissent des têtes bouclées à hauteur de main. Devant, derrière, de côté, je n'aperçois qu'enfants, si bien que j'en oublie leurs parents. Ils brandissent des papiers dessinés et s'amusent à faire une collection d'autographes. D'autres, très sérieux, les lèvres pincées, portent des jattes de lait, car c'est l'heure où ils peuvent aller chercher leur ration à la cuisine.

C'est une autre petite chambre, longue et étroite, dans un autre camp. Sur le poêle mijote un « extra ». En face de Mrs S., dame de confiance, de l'infirmière sociale et de la traductrice qui nous accompagnent, assises sur le lit, nous prêtons oreille aux soucis que ces trois femmes essaient de porter en commun. Nous écoutons les récits des naissances qui viennent d'avoir lieu - des jumeaux cette même semaine -et de celles à venir. On déballe les layettes que la Croix-Rouge britannique a fait parvenir à notre demande; nous admirons la laine rose et bleue que nous avons pu procurer. L'infirmière sociale me soumet son souci N° 1 : les nouveau-nés ont leur petit derrière rouge, ne puis-je pas intervenir et donner mon avis sur la façon de langer les bébés anglais que leurs mamans et les nurses du camp enveloppent sans beaucoup d'égard de couches de tissu-éponge. Je fais appel à toute mes connaissances personnelles et je réussis une démonstration en trois points: tissu-éponge, mousseline, bébé. A la tradition anglaise qui veut, paraît-il, que les langes soient seulement de tissu-éponge, j'oppose l'argument que sans doute les qualités de guerre n'ont plus le moelleux d'antan. Preuve en est la présence de couches mousseline dans les layettes. Le prestige est sauvé; le conflit anglo-allemand semble apaisé, tranché par un arbitre neutre.

Dehors devant les baraques, sur la terre aride un plateau dénudé, des petits s'amusent. J'aimerais pouvoir m'asseoir sur le seuil et les regarder longuement, j'aimerais jouer avec eux, faire des rondes ou aller en file indienne dans la campagne, cueillir des pissenlits.

Dans la tristesse de la tâche quotidienne au goût de cendre, il est un coin apaisant, c'est le tiroir aux frivolités où s'entassent les trésors que nous rapportons de nos courses dans Berlin: crayons de couleurs, plumes dorées, albums à colorier, animaux naïfs, bateaux rouges et camions verts, gravures ou cartes postales. Et souvent, en ouvrant les yeux sur ce jardin du domaine de mes préoccupations, chante en moi un poème du Gitanjali, si souvent lu autrefois au camp de la Lune, alors que les enfants dormaient:

« Sur le rivage des mondes infinis, des enfants s'assemblent. La tempête erre dans le ciel sans route, les navires sombrent dans la mer sans sillages, la mort rôde et les enfants jouent. Sur le rivage des mondes infinis se tient la grande assemblée des enfants. »









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