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L'accord des parents
« Et moi qui pensais que les parents étaient toujours d'accord ! » s'écriait un jeune homme de quinze ans. Sa mère venait de lui expliquer: « Si ton ami Pierre marche de défaite en défaite, tu dois le plaindre. La mésentente qui règne entre ses parents explique cette mauvaise conduite, d'autant plus que très souvent Pierre lui-même est la cause du désaccord».
Qu'ils sont heureux les enfants qui peuvent dire : « Mes parents sont toujours d'accord». Cette bonne entente est bienfaisante toute la vie, mais elle est spécialement nécessaire aux tout petits qui sont faibles et ont besoin de sentir de constants appuis autour d'eux. Ils ont besoin de protection, ils ont besoin de sécurité, et cette sécurité, seuls un père et une mère bien unis peuvent la leur donner entière.
Est-il donc désirable qu'il n'y ait jamais de discussion entre deux époux? Certes pas, si c'était le cas l'une des personnalités serait écrasée par l'autre. Les enfants souffriraient beaucoup de ce pouvoir dictatorial qui entraverait leur développement normal.
Il faut donc que les parents puissent discuter en toute tranquillité, argumenter, réfléchir en commun, se faire des concessions mutuelles avec bonne volonté, mais tout cela dans l'intimité. Les enfants ne doivent pas assister à ces discussions qui sont parfois vives ou même véhémentes. Ils sont incapables d'en comprendre l'importance et la valeur, et trop souvent s'imaginent que ce sont des querelles. Et si, par malheur, les discussions dégénéraient en querelles, espérons que les parents seraient assez sages pour ne parler à leurs enfants des décisions prises qu'une fois calmés et réconciliés.
Il va sans dire que dans la vie, c'est plusieurs fois par jour qu'un père ou une mère prennent à l'égard de leurs enfants des décisions ou une attitude sans en avoir, au préalable, discuté avec leur conjoint. La vie serait impossible sans cela, et les relations entre les parents et les enfants manqueraient de spontanéité et seraient empreintes d'une pédanterie bien désagréable. Mais si le père et la mère sont unis, dans le sens profond du mot, ils se seront mis d'accord dans les grandes lignes pour tout ce qui touche à leurs enfants. Cela suffira généralement, pour que les décisions prises par l'un des époux soient approuvées par l'autre. Si, par hasard, ce n'était pas le cas, que celui qui n'est pas d'accord attende d'être seul avec l'autre pour en faire la remarque. Ils décideront ensemble de l'importance de l'erreur éventuellement commise et de la manière d'y remédier si cela est nécessaire.
Il peut encore se faire que l'un des parents ait été injuste, trop sévère ou incompréhensif. L'enfant s'en aperçoit. Ce cas est assez fréquent, car, malgré leur bonne volonté, les parents ont des défauts qui ressortent nécessairement dans les moments de fatigue. L'autre parent doit alors examiner avec l'enfant très tranquillement l'erreur commise.
- « Maman, dit Jean, je viens d'aller vers papa lui demander une explication d'arithmétique. J'ai tant cherché la solution de mon problème sans y arriver. Je ne comprends pas non plus l'explication de papa, je m'étais donné pourtant beaucoup de peine. Il s'est fâché, m'a renvoyé, je ne sais plus que faire..»
- «Vois-tu, Jean, c'est dommage que papa se soit fâché, mais tu sais qu'il vient de rentrer fatigué de son travail et qu'il a faim. Je suis sûre que si tu avais attendu jusqu'après le dîner, papa reposé ne se serait pas énervé et que tout aurait bien marché. »
Après le repas, quand tout le monde est calmé, la mère glisse un mot au père. Vingt minutes plus tard, père et fils se quittent contents l'un de l'autre. Deux problèmes, l'un d'arithmétique, l'autre familial ont été résolus.
- « Pourquoi ne finis-tu pas ton livre, Madelon ? » dit un père a sa fille, tout étonné de ne pas la voir plongée comme chaque soir dans sa lecture.
- « Maman m'a privée de lecture , parce que j'ai été impertinente et peu complaisante. Mais ce n'est pas juste! » Et tout à coup la rancune et l'indignation. de Madeleine éclatent.
- « Ce matin, entre onze heures et midi, j'étais libre et voulais avancer l'étude de ma récapitulation d'histoire. Maman me dérangeait toutes les cinq minutes. Va me chercher des pommes de terre à la cave; puis, plus tard, des carottes au jardin. Après j'ai dû aller à l'épicerie. Pour finir, maman a vu qu'il n'y avait plus de pain et voulait que j'aille à la boulangerie. Alors j'ai « rouspété » en disant que c'était dégoûtant, que je n'avais pas une minute pour travailler, et maman m'a punie. »
- « Et bien, mon petit, je te comprends, mais je comprends aussi maman. Tu sais qu'elle est fatiguée et peu bien ces temps, donc elle met moins d'ordre dans son travail. Et comme le travail ménager est très morcelé, elle n'a pas réalisé qu'elle te dérangeait constamment. Une autre fois, en rentrant de l'école, va offrir tes services à ta mère en lui disant: « J'aimerais tout faire à la fois pour pouvoir aussi travailler à ma récapitulation d'histoire. Et tu verras que tout ira mieux. »
Quand les enfants sentent que si papa s'est trompé, maman peut le lui dire, et que si maman a été injuste, elle le reconnaîtra quand papa lui en parlera (ils devinent bien aux résultats que la chose s'est passée comme cela), leur confiance deviendra toujours plus grande.
Quand les parents savent avec équité juger d'un petit conflit familial, quand ils reconnaissent leurs torts, regrettent parfois une attitude ou une parole, leur prestige n'est pas diminué. Au contraire, le respect des enfants croîtra dans la mesure où les parents donneront satisfaction au sens de la justice, inné chez l'enfant. C'est alors seulement que ceux-ci auront pleinement cette assurance bienfaisante.
Nos parents sont toujours d'accord.
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