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Laissons parler nos enfants
Spontanément, le petit enfant a besoin de dire ce qui lui passe par la tête. Il ne peut suivre une conversation entre grandes personnes ou s'il la comprend, sa réaction naturelle est d'exprimer l'idée qui lui est suggérée à l'instant. Conformément à son égocentrisme, son seul souci est de se faire entendre, dût-il pour cela répéter plusieurs fois la même phrase. C'est l'éducation qui apprendra à l'enfant la discrétion, c'est-à-dire à savoir ne prendre la parole que quand il le peut, sans faire irruption dans une conversation entre d'autres personnes.
C'est aussi l'éducation de cette discipline à la maison qui préparera le petit écolier à savoir écouter la maîtresse, garder pour lui toutes les idées qui lui viennent à l'esprit - s'il ne veut pas être puni de babil - et à les exprimer seulement quand il y est invité. C'est inouï le nombre de petites choses où l'on retrouve l'aide précieuse que la famille et l'école s'apportent réciproquement.
A la maison, il peut y avoir l'une ou l'autre des deux attitudes extrêmes. Ou bien c'est la méthode despotique qui interdit à l'enfant, par principe, de prendre part à toute conversation. Un « tais-toi ! » lancé sur un petit ton sec et impérieux le lui rappelle s'il cède à la tentation de prendre la parole. Un tel comportement ne peut donner qu'un enfant timide, replié sur lui-même.
L'autre méthode veut que l'on écoute bouche bée tout ce que dit l'enfant, que l'on disserte longuement en sa présence sur les paroles «extraordinaires » qu'il vient de prononcer. Cela fera à coup sûr un petit vaniteux, un impertinent.
Mais entre ces deux méthodes extrêmes qui livrent à la société des inhibés ou des bavards ennuyeux, il y a celle qui formera des enfants de compagnie agréable.
Il faut d'abord savoir parler avec l'enfant. Bien des personnes s'adressent à lui comme elles le feraient avec l'adulte, lui tiennent des discours qu'il est incapable de saisir. D'autres pensent, au contraire, qu'il faut employer un vocabulaire spécial pour se faire comprendre de lui qui, d'ailleurs, n'est capable que de jouer et plaisanter. Une telle croyance est bien erronée: tout petit déjà, l'enfant pense et raisonne plus qu'il ne peut l'exprimer! Si l'on se donne la peine de se mettre à sa portée, de chercher à saisir ses idées, l'enfant aime à s'entretenir avec les grandes personnes. C'est là une précieuse occasion pour nous de lui expliquer beaucoup de choses, de le faire réfléchir sur les questions qu'il pose, de gagner sa confiance enfin.
Je connais un petit garçon de cinq ans dont la plus jolie récompense, après avoir été sage, est de pouvoir, avant d'aller se coucher, causer un instant avec son papa. « Viens papa, nous allons faire la petite conversation! » Et père et fils se retirent dans un coin de la grande chambre. Michel, à califourchon sur les genoux de son père, pose alors une question sur la lune, les étoiles, la jeep ou les lacustres, et voilà « la petite conversation » amorcée !
Je suis sûre que Michel retirera davantage de ces courts entretiens que de la lecture de bien des livres.
Au fur et à mesure que l'enfant grandit et prend part à la vie sociale, il doit apprendre à y occuper sa place et y jouer son rôle. Etre poli, discret, mais aussi faire valoir les dons de son esprit, voilà, dans ce domaine, l'équilibre que l'éducation devrait permettre.
La parole est d'argent, dit un vieux proverbe, le silence est d'or. Mais je suis d'accord avec cet éducateur belge, qui, dans l' « Education familiale» de janvier 1946, disait que ce vieux proverbe, comme tant d'autres, n'a qu'à moitié raison. La parole est d'or quand on sait s'en servir avec esprit ou avec courage: voilà qui est encore bien plus vrai.
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