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Pour être heureux en ménage
(Un autre aspect du bonheur conjugal *)
L'amour est comme la semence de riz qui pousse d'autant mieux qu'on la repique.
« Aime-moi comme la source qui donne peu d'eau à la fois mais qui en donne longtemps ».
(Proverbes malgaches.)
Une jeune fille qui avait déjà doublé le cap des 25 ans poursuivait son chemin solitaire. Son oncle, vieux garçon dont elle était la nièce préférée s'en étonnait : « Pourquoi donc ne te maries-tu pas a lui dit-il un jour?
Avec un sourire elle lui répondit : « C'est que je veux tout. »
Quelque temps après, la jeune fille annonce ses fiançailles à son oncle. Un peu moqueur, il s'informe « Alors, tu as trouvé tout? » Radieuse et sans hésitation : «Mais oui, répond-elle, j'ai trouvé tout. »
Tout, ce mot un peu présomptueux concernant le mariage, que signifiait-il pour celle qui l'employait avec tant d'audace ? Avantages physiques, fortune, situation sociale ? Sans mésestimer leur valeur, elle attachait plus de prix à ce qui peut faire de deux êtres très divers un couple harmonieux et fidèle : amour profond fait non seulement de passion, mais de confiance et de respect mutuels, foi aux certitudes éternelles, similitude de goûts.
Cette union a été heureuse, malgré les difficultés inhérentes à toute vie humaine et les tentations qui ont surgi le long du chemin. Les enfants issus d'elle ont connu le charme et la douceur d'un vrai foyer.
Si le mariage est le point culminant de la vie d'une femme et en quelque sorte son point de départ, il est davantage pour l'homme un point d'arrivée. Le foyer sera pour lui une oasis, où, après les longues heures de travail, il retrouve la joie de vivre, l'oubli de ce qui le préoccupe, l'amour après lequel il soupire.
Pour mener à bien cette grande aventure, les jeunes gens ne s'y lanceront pas les yeux fermés, mais ils la prépareront, tel un voyage au long cours, dont on savoure à l'avance la séduction parce qu'on en devine le charme. Avec enthousiasme
, certes, mais surtout avec une vue claire de ce que réclame une vie conjugale heureuse : amour, patience, oubli de soi; sans omettre ce qui peut sembler de moindre importance : minimum de sécurité qu'exige un bon départ. Et puisque c'est à la femme qu'incombe le lourd souci d'équilibrer le budget, elle apportera les connaissances nécessaires à la bonne tenue du ménage en évitant à son mari les petites piqûres d'épingles qui nuisent à la paix : Car «le foyer n'est pas simplement un appartement, c'est un chez soi» où « la femme est maîtresse et déploie les ressources de sa fantaisie et de son cÅ“ur ».
A mesure que la passion du début se fera plus raisonnable et que les époux chercheront moins à se plaire mutuellement, leurs défauts apparaîtront sans voile, et l'égoïsme, sous toutes ses formes, reprendra chez l'un et l'autre la place momentanément perdue. Car le rival le plus redoutable du bonheur conjugal n'est peut-être pas tant celui qui peut surgir au détour du chemin que l'égoïsme, rival sournois et dangereux, qui se glisse partout.
L'égoïsme
, qui pourra déraciner cette plaie du coeur de l'homme et de la femme ?
La jeune fille voit-elle autre chose dans le mariage que la réalisation de son rêve, la satisfaction de ses désirs et de ses ambitions ?
Le jeune homme espère-t-il seulement trouver dans le foyer qu'il fonde un atout de plus sur le chemin du succès, le moyen d'atteindre son bonheur personnel, le lieu où ses désirs égoïstes seront comblés ? De telles unions mènent presque fatalement au divorce.
La vraie source du bonheur conjugal est dans une vue nette de ce que réclame le bonheur du conjoint et dans le sacrifice, que tous deux acceptent de faire l'un pour l'autre, de leur égocentrisme.
De nos jours, on se prend à l'essai. Quand cette tentative échoue, on se quitte et on recommence ailleurs.
Pour éviter cette plaie qu'est le divorce, il est nécessaire que le couple poursuive le même but, approfondisse ses sentiments et les développe. Et cela d'autant plus dans les unions où la femme est obligée de travailler pour parfaire le gain de l'homme, où la fatigue de l'un et l'autre met tant de fois les nerfs à vif.
L'une des principales causes de désunion est dans « le défaut de préparation au mariage, la légèreté inouïe avec laquelle, trop souvent, le mariage est contracté entre jeunes gens égarés par un entraînement passager, mais chez qui n'existe pas ce minimum d'aspirations communes ou de points de contact indispensables à la création d'une union solide ».
Il y a trop de gens mal mariés parce que mal préparés à leur vie commune. Le rôle de la famille, des éducateurs et de l'Eglise auprès des futurs époux est de leur faire considérer le mariage avec tout le sérieux qu'il comporte, l'énorme danger que représentent les mariages mixtes dont les conséquences sont souvent dramatiques. « En Suisse, les divorces sont de deux à trois fois plus fréquents parmi les unions conjugales confessionnellement mixtes que parmi les unions confessionnellement homogènes ». « Une foi religieuse solide et concordante est en effet l'appui le plus sûr pour permettre aux époux de surmonter les graves difficultés auxquelles toute vie conjugale risque d'être exposée ».
« C'est avant le mariage que les futurs conjoints doivent comprendre que leur union doit normalement les lier pour la vie ; c'est dans le mariage qu'ils doivent apprendre que nul conjoint n'est parfait et que chacun doit assez aimer pour savoir beaucoup pardonner ».
«Le niveau le plus « élevé » du mariage n'est point celui où chaque époux réclame de l'autre qu'il lui donne toutes les satisfactions du corps et de l'esprit, mais celui où chacun aime l'autre « comme lui-même ».
« Et voilà ce qu'en dit Ramuz dans des pages admirables placées en tête du Livret de Famille Vaudois ». « Il y faut de l'amour et l'amour n'est pas ce qu'on croit quand on commence. Ce n'est pas seulement ces baisers qu'on échange, ces petits mots qu'on se glisse à l'oreille, ou bien se tenir serrés l'un contre l'autre ; le temps de la vie est long, le jour des noces n'est qu'un jour, c'est ensuite, tu te rappelles, c'est seulement ensuite qu'a commencé la vie. Il faut faire c'est défait ; il faut refaire et c'est défait encore
Tous ces soucis, tous ces tracas; seulement tu as été là. On est resté fidèle l'un à l'autre. Et ainsi j'ai pu m'appuyer sur toi, et toi tu t'appuyais sur moi. On a eu la chance d'être ensemble, on s'est mis tous les deux à la tâche, on a duré, on a tenu le coup. Le vrai amour n'est pas ce qu'on croit. Le vrai amour n'est pas d'un jour, mais de toujours. »
* Voir Entretiens octobre 1946.
Cet article a été inspiré par la lecture des journaux suivants :
Annabelle, mai 946
Feuillets Universitaires, mai 1946
Cahiers Protestants, juillet-août 1946
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