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Façons de parler

J'ai entendu, dernièrement, deux phrases, oh! bien simples, bien quelconques, et l'on m'en a rapporté une troisième non moins banale, qui m'ont paru cependant traduire, sous des formes diverses, une manière de penser et de sentir assez répandue dans notre pays. Les voici.

Un fonctionnaire postal, à qui je demandais de faire suivre mon courrier, et que je remerciais d'avance pour sa peine, m'a répondu sur un ton officiel, presque austère: « Nous sommes ici pour cela, monsieur ». Une vieille femme, qui avait rempli chez moi d'humbles besognes ménagères, et que je félicitais de son activité, m'a rétorqué : « Quand on est payé pour un travail, il faut bien le faire jusqu'au bout ». Et une infirmière, à qui une famille en deuil manifestait sa gratitude pour le dévouement qu'elle avait déployé, se contenta de dire: «Je n'ai fait que mon devoir ».

Ces trois réponses, d'apparence insignifiante, sous-entendent toutes trois un même et curieux refus du remerciement. Et aussi la crainte vague d'être l'objet d'un compliment ou d'une amabilité qui dénoteraient un je ne sais quoi d'hypocrite. Donc pas de surenchère. Par sincérité, par dignité, d'ailleurs mal comprise, on met une sourdine à l'expression de ses sentiments, on demeure sur son quant à soi, on tient l'interlocuteur à distance.

Mais les trois phrases que j'ai collectionnées trahissent aussi un état d'esprit que je qualifierai de juridique et de moralisateur. Postier, femme de ménage ou infirmière, j'exécute les clauses d'un contrat tacite, passé entre moi et le public, j'observe un règlement, et cela suffit pour me justifier. En vous faisant remarquer que mon obligation professionnelle est d'ordre général, j'atteste que je ne vous rends pas un service particulier, mais que je me conforme à ma charge, à mes engagements. Dès lors, nous sommes quittes. Vous n'avez pas à m'en savoir gré. Nous demeurons libres l'un vis-à-vis de l'autre, ce qui m'importe avant tout. Je suis dans mon droit, puisque je fais mon devoir.

Devoir! Une fois prononcé ce mot dur et triste, on est couvert. On a sa conscience pour soi. Et, sans doute, il faut louer les gens qui remplissent strictement leur tâche, les admirer d'être et de se savoir irréprochables. Mais que cette pure atmosphère est donc froide !… Ce que la famille en pleurs espérait de l'infirmière, ce n'était pas seulement qu'elle soignât de son mieux la malade, mais qu'elle s'attachât à celle-ci, que son dévouement ne fût pas dicté seulement par une exigence professionnelle, mais qu'il s'y mêlât de l'affection. Faire son devoir est bien: aller au delà de son devoir serait encore mieux.

En somme, l'état d'esprit que j'essaie d'analyser exclut la gratuité. Rien n'est offert pour rien, rien n'est ajouté en plus, pour le plaisir, par gentillesse et gracieuseté. Donnant, donnant. A ce régime, les relations humaines sont précises et correctes, n'appellent aucune réclamation, ni d'un côté, ni de l'autre. Seulement, dépourvues de charme personnel, privées de sourires, elles vous laissent insatisfait, déçu peut-être, et comme frustré.
Vivant en société, nous avons tous besoin les uns des autres. Comme nos rapports quotidiens seraient plus agréables, si, renonçant à exciper de nos droits et à invoquer nos devoirs, nous faisions croire à notre interlocuteur qu'il éveille notre sympathie, et que, tout en appliquant un règlement ou en exécutant une convention, nous lui rendons un service, nous lui accordons un privilège -parce que c'est lui. D'un mot : obéir à l'esprit plutôt qu'à la lettre.









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