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Corriger, c'est bien. Encourager, c'est beaucoup mieux !
Un homme de coeur disait : «Tout être humain a besoin de 80 % d'encouragement et seulement 20% de critique. » En le mettant en pratique, il a aidé à naître à une vie supérieure des centaines d'hommes et de femmes qui n'avaient besoin que d'un climat de bienveillance et de compréhension pour se dépasser et prendre la « bonne route ».
Nous ne nous doutons même pas, peut-être, à quel point nous avons tous besoin non seulement que notre prochain croie en nous, mais aussi qu'il nous apprécie. Notre assurance est comme une maison branlante dont le crépissage recouvre quantité de lézardes. Un rien nous la fait perdre, une critique (surtout si elle est faite sans amour) l'ébranle profondément, tandis qu'une marque d'approbation la consolide d'une manière efficace. Cela ne signifie pas qu'il faille encourager une assurance superficielle ! il nous faut bien plutôt passer de celle-ci au tranquille équilibre d'une force qui connaît ses limites mais qui a choisi de s'appuyer sur Celui dont la force est sans limite.
C'est à tout âge que nous avons besoin de nous sentir appréciés, mais les adolescents tout particulièrement car ils ont perdu l'inconscience de l'enfant et n'ont pas encore acquis une certaine sûreté que donne l'expérience de la vie.
Et voici que l'adolescence est justement dénommée « l'âge ingrat », où rien n'attire l'indulgence et la bienveillance des adultes ; au contraire cet « âge ingrat » les découragerait plutôt par ses idées changeantes ou excessives, par ses jugements tranchants ou ses timidités maladroites. Et cependant sous ces dehors si peu engageants se cache un intense besoin d'être apprécié et encouragé. Je connais un jeune homme qui fut invité à faire un séjour dans une maison amie. Il se fit un peu tirer l'oreille pour accepter l'invitation, car il pensait que ses idées de gauche, très avancées, ne s'accorderaient pas avec le milieu dit « bourgeois » où il était invité. Cependant, pressé par ces amis, il se décida à venir. La famille comprit qu'elle n'avait pas à juger les idées de son jeune ami, ni à les discuter ; elle voulut simplement le rendre heureux et lui procurer quelques bonnes journées de détente physique et morale. Chacun prit son plaisir à lui rendre la vie agréable ; il fit du ski avec l'un, parla à coeur ouvert avec son compagnon de chambre, joua au bridge, partagea la vie simple de la famille et prit tout naturellement sa part de quelques travaux ménagers. Le jour de son départ, ses amis eurent avec lui un dernier moment d'échange amical. L'un deux lui dit : « Jean, j'ai remarqué trois choses en toi : ta serviabilité, ta sincérité et ta modestie, car tu en sais beaucoup plus que nous sur bien des sujets et tu ne nous l'as jamais fait sentir. Je te remercie de tout ce que tu nous a donné ». Ces simples mots émurent Jean : « Comment, dit-il, c'est vous qui me remerciez alors que j'ai été si bien reçu ! Je n'y comprends rien. Et dire que j'ai failli ne pas venir ! » Il partit, mais ses amis sentirent qu'un lien vivant, plus fort que ce qui les séparait s'était noué entre eux parce qu'ils avaient pu s'apprécier mutuellement
et qu'ils se l'étaient dit.
«C'est si simple d'aimer », dit la chanson ; c'est moins simple de s'apprécier mutuellement et surtout de se le dire, et c'est pourtant cela qui est la force invisible semblable à celle qui fait germer la graine ou éclater le bourgeon.
On risque de se tromper vingt fois en critiquant quelqu'un, et peut-être une fois seulement en l'encourageant par un éloge ou une marque de confiance. Car notre critique est toujours subjective et empreinte des impressions qui nous ont piqués au vif et ont déclanché notre réaction - mais l'encouragement est un fruit du meilleur de nous-même, il marque un effort d'objectivité et de compréhension, il frappe à la porte du meilleur lui-même de l'autre, et c'est pourquoi il a beaucoup plus de chance d'être efficace.
Mais il y a mieux que cela. Ecoutez cette définition : Aimer son prochain, c'est lutter pour qu'il devienne grand. Au delà des éloges et des encouragements, qui nous laissent en somme spectateurs du développement de notre prochain, il y a l'engagement de nous-même aux côtés de ce prochain pour l'aider à grandir. Ce combat doit être mené très discrètement, très humblement ; il implique la recherche de la vocation profonde de ce prochain (chaque être humain en a une) et une vigilance de chaque jour pour l'aider à s'en approcher et à lui demeurer fidèle.
Deux jeunes gens vinrent récemment passer quelques jours sous notre toit, l'un était américain et l'autre hindou. Le premier, âgé de 21 ans, avait le visage rayonnant et purifié d'un homme né à une vie supérieure. L'autre, plus jeune de deux ans, avait l'expression mobile et quelque peu tourmentée d'un adolescent en pleine formation. L'aîné enveloppait son cadet d'une vigilante sollicitude, il cherchait en particulier à le rendre sincère et vrai dans tout ce qu'il disait et faisait et pour un oriental, c'est particulièrement difficile. Ce contrôle amical, si dépréoccupé de soi, si visiblement occupé du bien de l'autre, fut pour moi une émouvante leçon.
Aimer son mari, aimer ses enfants, aimer ses amis, c'est lutter pour qu'ils grandissent, c'est bannir de soi-même tout amour faible, égoïste ou dominateur et se mettre au service de leur véritable bien de toutes ses forces, de tout son cour, de toute sa foi.
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