
|
|
Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
En dehors du grand intérêt pour vous de cette matière exceptionnelle, que vous soyez jeune parent, chercheur dans une université ou simplement intéressé par l'évolution des comportements humains, votre soutien par l'intermédiaire d'un abonnement nous est indispensable.
Pour les pays lointains et si vous ne désirez pas profiter de la version papier, un abonnement sous forme de pdf est accessible au même prix annuel de CHF 30. Il vous donne un accès complet aux archives
La façon de donner
Dans la chronique familiale de « Culture Humaine», nous trouvons le cas suivant. Il s'agit d'une jeune fille que des parents aisés avaient gâtée, notamment par divers présents, dont quelques bijoux d'une certaine valeur. Sa meilleure amie, de famille pauvre, tomba gravement malade et dut entrer au sanatorium. Pour adoucir son sort, notre jeune personne engagea immédiatement, et à l'insu de ses parents, ses bijoux au mont-de-piété. Mais la famille apprit les faits. Explications, reproches, disputes.
Comme nous le voyons, la question de la libre propriété des objets reçus a son importance et mérite que nous y réfléchissions.
Voici la réponse qui a été donnée au problème posé :
D'une manière générale, enfants et adolescents sont plus prompts à donner que les adultes. Cela tient à deux raisons :
1. Ils connaissent mal la valeur matérielle des choses et combien il faut peiner pour la moindre acquisition
2. Ils sont enthousiastes, vite émus, car ils en sont à leurs premières impressions. Leur sensibilité n'est pas, comme la nôtre, émoussée, même lorsqu'ils affectent des airs blasés ! Ils ne savent point ce goût d'amertume que les ingratitudes, les déceptions répétées laissent à certains d'entre nous.
Aussi donnent-ils sans calcul, sans réticences, sans se demander ce qu'autrui ferait s'ils étaient à leur tour dans le malheur, persuadés que le malheur n'est pas pour eux!
Le geste de cette jeune fille est donc, pour elle, naturel. Il est davantage : puisqu'il s'agit d'un commencement de femme, ses bijoux mis en gage représentent une sérieuse privation, un renoncement à la coquetterie.
Les parents, eux, déplorent surtout deux choses :
1. La perte, et le peu de valeur sentimentale attachée aux bijoux par eux offerts ;
2. la dissimulation de leur fille.
Pour le premier point, il conviendrait une bonne fois, dans les familles de s'entendre sur le sens exact du mot « cadeau ». Est-il implicitement admis, lorsque les parents offrent à l'enfant un objet, que cet objet, doive demeurer dans la maison? Ou bien l'enfant a-t-il, dès que l'objet lui appartient, le droit d'en disposer?
La seconde hypothèse paraît logique : ce qui est donné ne nous appartient plus. De plus, si l'on offre un objet ou une parure, c'est pour faire plaisir. Si donc le plus grand plaisir de l'enfant - qui, ne l'oublions pas, ne possède rien en propre - est de donner à son tour le peu qu'enfin il possède, est-il juste de l'en empêcher?
Pour le second point nous voici en présence de l'ennemi n° 1 de presque toutes les familles, ennemi que nous rencontrons au départ de bien des malentendus : le manque de confiance.
La jeune fille a agi seule ; c'est qu'apparemment elle connaissait par avance le refus qu'on lui opposerait. Ce ne sont pas les enfants qui créent le climat d'une famille Ou, s'il en était ainsi, c'est que les parents montreraient une personnalité bien pâle¨ !
Trop peu de parents, aujourd'hui encore, permettent le libre exposé des désirs, des besoins, voire des erreurs de leurs enfants, et en admettent la libre discussion. Il ne s'agit nullement de laisser les jeunes faire tout ce qu'ils souhaitent ; mais bien plutôt de leur proposer des solutions, de faire jouer devant leurs yeux étonnés une facette du problème qu'ils n'ont pas tout d'abord aperçue, au lieu de leur imposer de desséchantes interdictions.
La confiance, qui ne gêne en rien l'esprit de famille mais au contraire le fortifie, est décidément le plus beau et le plus utile cadeau à faire à la jeunesse!
Rien n'est d'ailleurs perdu en ce qui concerne les rapports entre la jeune fille aux bijoux et ses parents. Et même, à la faveur de cet incident, tout peut être gagné, si l'intransigeante jeunesse et l'irréductible âge mûr, chacun y mettant du sien, veulent bien reconsidérer cet incident et prévoir ceux à venir, sur le plan de la confiance.
|
|
|