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Les rôles s’inversent
« Nous avons le grand-papa le plus formidable du monde » nous disent nos enfants. Ce grand-père est d’autant plus important qu’il est leur seul aïeul et pourtant, il n’est pas conforme à l’image classique que les médias donnent du grand-père type. Bien qu’ayant six enfants et onze petits-enfants, il porte les bébés comme des objets délicats et un peu étranges. Il préfère tester leurs réactions comme un scientifique plutôt que de faire des risettes et des câlins ; mais il est très attendri par ces petits êtres et dès qu’ils se débrouillent un peu seuls, c’est avec plaisir qu’il s’en occupe.
Lorsque l’un des ses petits-enfants part en course d’école ou en voyage, il appelle déjà avant l’heure du retour pour prendre de ses nouvelles. C’est aussi avec assiduité qu’il vient assister aux spectacles de fi n d’année, aux auditions de musique ou au défi lé des promotions et même à la course de l’Escalade, oĂą il a souvent attendu dans le froid en essayant de repérer le jeune coureur parmi une foule dense d’enfants qui se ressemblent, afi n de le photographier et ainsi d’illustrer son album de photos.
Quand les enfants étaient plus jeunes, ils passaient régulièrement quelques jours de vacances chez leur grand-père qui leur réservait un programme d’enfer. C’est ainsi qu’il a emmené les plus âgés à Venise ou à Paris, qu’il est allé visiter des musées et des zoos, qu’il a bricolé avec eux et même parfois sorti son vieux train pour le monter à genoux par terre.
Actuellement, il se fatigue plus rapidement qu’auparavant et n’a plus l’entrain nécessaire à un programme aussi chargé comme à l’époque de ses 80 ans oĂą il avait encore accepté d’emmener ses petits-enfants à Aquaparc.
Ceux-ci aiment toujours passer quelques jours de vacances chez lui, afin de le voir et de lui rendre service. Ils lui préparent des menus à l’avance et lui cuisinent des repas diversifiés et diététiques. Lors d’un repas familial se terminant tardivement, ce sont les jeunes qui lui proposent de le reconduire chez lui, afin de lui éviter de prendre le volant. Mais leur succès est mitigé, car bien qu’âgé, leur grand-père est resté très indépendant et n’est pas forcément d’accord de se faire « paterner » par ses descendants.
Au cours du temps, les rapports tendent à s’inverser. Il y a quelques années c’était sans conteste le grand-père qui avait l’autorité et qui surveillait ses petits-enfants ; mais actuellement ce sont eux qui ont tendance à le protéger et à s’occuper de lui afin de le prémunir de tout problème. Ils gardent toutefois beaucoup de respect pour son autorité et pour son savoir immense. Mon fils dit de lui : «C’est énervant : grand-papa sait toujours tout sur tout et en plus il a constamment raison. » Ceci est vrai, sauf pour l’informatique à laquelle il n’a jamais croché.
Il n’y a pas qu’avec leur grand-père que les rôles changent : par exemple pour écrire cet article, je sais ce que j’aimerais dire, mais n’arrive pas à trouver le début. C’est ma fille qui me suggère la première phrase. Enfin, le texte se construit, mais l’article terminé ressemble à un devoir, il lui manque une tournure de phrase un peu accrocheuse. Pas très satisfaite, je le fais lire à mon fils qui le retravaille avec moi. C’est la première fois que ce sont mes enfants qui me corrigent un texte.
Jusqu’à maintenant c’était mon rôle de revoir leurs exercices. Finalement c’est assez bon de les voir grandir !
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