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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
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Les jouets dans l'éducation des enfants

0 mères! Vous qui pensez être la principale éducatrice de vos filles, regardez autour de vous et demandez-vous quelles sont les tendances, les goûts, les aptitudes de vos enfants, et vous vous assurerez bien vite que cette éducatrice n'est autre que sa poupée ... Oui, la poupée que vous donnez à profusion, et souvent inconsciemment à vos filles, amène d'abord dans leur coeur le sentiment de l'amour maternel et celui de l'imitation qui les porte à répéter à leur poupée ce que vient de dire la mère.

A ce point de vue, rien n'est donc meilleur que la poupée pour la fillette, mais à la condition qu'elle ne lui apportera pas aussi les éléments d'une éducation fausse et vaniteuse. Et cependant c'est le rôle qu'on leur fait jouer avec entrain, avec conviction, comme si, en leur donnant un faux plaisir, on remplissait un devoir.

La poupée n'est plus, de nos jours, le bébé que l'on soigne et que l'on aime, à qui l'on apprend à vivre en lui donnant les instructions qu'on a reçues. Elle est, le plus souvent, et ce sont les plus recherchées, une grande dame aux allures fringantes, luxueuses ou éhontées, que la petite fille ne tardera pas à chercher à imiter.... La poupée a une longue traîne à sa robe; elle a des bijoux, des meubles de luxe et un air impertinent qui attire les regards et les réflexions. La fillette s'arrête étonnée et surprise devant elle, et sans pouvoir réfléchir encore, elle comprend et elle sent.

Elle sent que sa robe à elle est courte et quelquefois très modeste; qu'elle n'a à son service ni bijoux ni meubles de luxe, et que son air est simple, mais naturel, comme sa petite personne.

Alors, elle relève la tête et pense: Oh! quand je serai grande, quand je pourrai, je serai comme la belle poupée.

Et de ce jour, si vous ne vous hâtez pas de détruire cette impression, vous avez créé la femme qui préférera le luxe à la position modeste, c'est-à-dire celle qui ne balance pas entre le vice et le travail. Quelle différence avec celle à qui l'on donne la vraie poupée, sans ornement, toute nue comme l'enfant est venue au monde! . . . Celle-là, il faut l'habiller soi-même et la protéger, en faire sa fille et lui donner l'éducation qui la façonnera à l'image de sa mère.

Comme elle devient utile et nécessaire cette poupée-là! Car c'est par elle que vous connaîtrez les tendances du caractère de l'enfant, c'est elle qui vous dira ce qu'il faut encourager ou réprimer dans son coeur, et dans son intelligence qu'elle aide à former.

Je ne veux, pour corroborer ces réflexions, ne vous citer qu'un exemple, celui d'une petite fille pauvre regardant avec étonnement un étalage de poupées, dans un splendide magasin à la mode.

Rêveuse et attentive, l'enfant examinait tous ces objets brillants comme elle eût regardé la lune ou les étoiles. - Est-ce que tu désires une de ces belles poupées? lui demanda une dame dont cette longue contemplation avait attiré l'attention. Oh! non, madame, répondit doucement l'enfant; je veux une poupée qui puisse être ma fille, et celles-là sont trop riches pour moi; j'aurai l'air d'être leur servante.

Cela ne ressemble-t-ill pas beaucoup au père paysan qui met tout son orgueil à faire de son fils un monsieur qui n'a plus assez de coeur pour aimer et respecter les siens.


Les petits enfants n'ont pour ainsi dire encore ni raisonnement, ni réflexions, ils n'ont que des impressions qui agissent sur leur esprit pour le former plus tard, quelquefois au détriment de leur coeur, s'il a été mal impressionné dès les premières années.

Les jouets constituent pour eux, un puissant moyen d'éducation, en représentant, sous une forme visible et tangible, les enseignements qu'ils ne comprendraient pas sans cela.

Il est donc facile d'apprécier quelle grande importance nous devons attacher au choix de ces éducateurs, qui les forment pour l'avenir. Bien souvent une nature artistique s'est fait jour et s'est développée à la vue d'objets bien faits, harmonisés dans leurs proportions, et représentant la nature, comme la nature elle-même. D'autres, au contraire, qui auraient peut-être les mêmes dispositions, en ont été éloignés par la vue continuelle de choses discordantes ou antinaturelles.

Oh! parents, vous qui chérissez et voulez le bien de vos enfants, prenez donc garde, et réfléchissez, vous qui pouvez réfléchir, pour l'enfant qui n'a encore que des sensations.

Pensez-vous peut-être que c'est toujours naturellement qu'un petit garçon aura l'humeur batailleuse et des goûts militaires ? Non certes mais il aura été élevé avec des tambours, des sabres et des trompettes, il aura été entouré de petits soldats, et son existence future se ressentira nécessairement du développement un peu tapageur qui aura été donné à son intelligence.

Celui-là souvent sera studieux et travailleur, ami de la solitude et du calme, à qui l'on aura donné des pinceaux, des couleurs, des livres d'images ou des jouets qui auront exercé son esprit et sa patience.

Ces observations, chers parents, sont loin de constituer une règle absolue et immuable; il y a pour le jeune enfant d'autres agents éducateurs que ses jouets; mais les faits et les résultats les ont si souvent confirmés que nous serions imprudents et coupables de ne pas en tenir un compte important.









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