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L'Éducation, une vie
L'éducation est bien moins un ensemble de leçons et de procédés, que le centre d'idées, de sentiments et de devoirs où nous plaçons nos enfants; c'est l'atmosphère où nous les laissons vivre. Je goûte peu les traités d'éducation, parce qu'ils passent à coté du fait essentiel. Il ne s'agit pas de méthodes, mais de vie.
La vie est-elle chez nous? Y respire-t-on un air vivifiant ? Y voit-on aimer les choses nobles et belles ? Y voit-on flétrir les lâchetés ? Les causes généreuses y trouvent-elles un réel appui ? Les coupables railleries de l'égoïsme y meurent-elles étouffées ? Alors la grande éducation est là.
Un des mérites de la grande éducation, c'est qu'elle peut se passer de minuties. Suivant toujours les voies simples et droites, elle ne prend jamais des allures d'inquisiteur, elle qui n'encourage aucune délation, elle n'a point de police secrète.
Il est des parents, très tendres et très consciencieux d'ailleurs, qui peuvent, à force de surveillance, d'interrogatoires, de réglementations détaillées, faire peser une lourde oppression sur leurs enfants. L'oppression, quelle qu'elle soit, n'élève pas les âmes; elle les écrase ou les avilit. Les vraies familles, celles où l'autorité est debout, ont horreur de la tyrannie. Elles savent quelle part de liberté est nécessaire aux jeunes gens; elles acceptent la liberté avec ses périls. Ne faut-il pas que les caractères se forment, que les responsabilités apparaissent ? Nos fils, élevés aux lisières, deviendraient-ils capables d'accomplir leur oeuvre ici-bas ? La liberté qui naîtra ainsi, au fur et à mesure de l'âge et du développement moral, sans système préconçu mais en vertu d'un sentiment paternel qui ne trompe guère, ne ressemblera ni à l'indépendance presque absolue dont jouissent par malheur beaucoup d'enfants en Amérique, ni à cette autre indépendance plus funeste que crée si souvent notre faiblesse. L'éducation virile laissera flotter les rênes; elle n'aura garde de transformer la maison en cachot; elle en ouvrira les portes toutes larges à la lumière et au grand air; elle sera confiante, elle ne sera pas molle; elle se fera oublier quelquefois; elle n'abdiquera jamais. Qu'il s'agisse des filles ou des garçons, des pauvres ou des riches, l'éducation a ce caractère constant qu'elle ne peut se formuler en théorie, qu'un manuel supportable de l'éducation ne s'écrira jamais; elle est une influence, un air que nos enfants respirent, le souffle vivifiant du foyer.
Et voilà pourquoi l'éducation ne se délègue pas; nous pouvons faire donner des leçons à nos enfants, nous ne pouvons pas les faire élever. Si la maison paternelle est mondaine, ils seront mal élevés. Si nous les exilons loin d'elle sans maintenir avec force l'action permanente de la famille, ils ne seront pas élevés du tout.
Si nous les élevons, quelles que soient d'ailleurs nos ressources d'enseignement au dehors, écoles, collèges ou maîtres particuliers, les moyens à employer pour réussir dans notre oeuvre sont d'une simplicité telle, que les coeurs de pères et de mères ne sauraient manquer de les découvrir. Rappelons-les en peu de mots.
Le premier moyen, c'est d'aimer nos enfants; le premier enseignement de la famille, c'est la tendresse. Il faut que leurs grands amis soient à la maison. Sans nous abaisser, sans prendre le rôle de camarades, sans pratiquer la mauvaise égalité, sans compromettre notre dignité et le respect qui nous est dû, nous nous lierons étroitement avec nos enfants. Vous la connaissez cette affection d'une nature spéciale, pleine de charmes, de délicatesse, et de profondeur, cette affection croissante et parfois intime, qui s'établit entre les parents et les enfants.
Elle ne naît que dans les vraies éducations, lorsque la famille n'a pas renoncé à son rôle. Elle est un des plus beaux dons que nous puissions faire à nos fils et à nos filles; elle est aussi une des joies les meilleures que nous puissions recevoir d'eux.
(A suivre.)
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