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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
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L'Education, une vie

(Suite)

Nous n'oublierons pas, c'est un de nos devoirs, de rendre notre intérieur aimable. Il faut que nos enfants se trouvent bien à la maison; il le faut, car s'il en était autrement, si leurs meilleurs moments ne se passaient pas près de nous, s'ils n'aspiraient pas à la réunion de famille comme à la fête et au couronnement de la journée, il manquerait quelque chose d'essentiel au développement de leur coeur. Nous leur devons la gaîté, la jeunesse en a besoin. Cela vaut un effort; nous serions tentés souvent de nous laisser aller à notre humeur, de multiplier et de faire durer les orages domestiques; prenons-y garde, les orages prolongés ne font pas de bien.

Non, l'éducation grondeuse n'est bonne pour personne, ni pour les jeunes, ni pour les vieux; elle crée des habitudes maussades; elle fait qu'on redoute les heures de réunion, au lieu de les désirer; elle fausse quelques fois les caractères, car les enfants qui vivent dans l'appréhension constante des scènes sont portés à dissimuler certains faits; une crainte presque servile remplace la soumission filiale et l'ouverture de coeur disparaît.

Cependant les bons parents sont ceux qui grondent, c'est une règle à peu près sans exception; mais autre chose est la sévérité bienfaisante qui reprend le mal et ne pactise jamais avec lui, autre chose une succession non interrompue de reproches, une irritation à l'état chronique. La fermeté a en elle je ne sais quoi de vigoureux et d'élastique qui ne nous permet pas de languir dans les bas-fonds d'un mécontentement découragé. Fortement repris, fortement aimés, nos enfants trouvent le port après la tempête et goûtent la sécurité du vrai pardon.

Ainsi la faiblesse est exclue en même temps que l'humeur noire; on tâche de ne faire ni des esclaves ni des enfants gâtés, on fait des hommes.

Oeuvre magnifique et difficile; nous n'y réussissons qu'à la condition de veiller sur nous-mêmes et de compléter un peu notre propre éducation en vue de l'éducation de nos enfants. Il est bien des choses, par exemple, que nous ne devons pas dire devant eux. Sans vouloir pousser trop loin le système des précautions et quoique convaincu qu'un régime de vérité leur est avant tout nécessaire, qu'il importe de les habituer graduellement à la vie telle qu'elle est et de ne pas les rendre semblables aux plantes de serre chaude qui ne supportent pas le grand air, je pense cependant que nous leur rendrions un triste service si nous ne ménagions pas nos transitions. Leur organisation délicate serait froissée par le brusque contact de certains objets, leur foi naissante ne survivrait peut-être pas à l'assaut de certains doutes brutalement présentés. Quand nous sommes en famille, nous n'avons le droit ni de poser toutes les questions, ni de discuter tous les problèmes, ni de raconter toutes les histoires, ni de lire tous les livres. Combien de livres, d'ailleurs honnêtes (nous n'en lirions pas d'autres), qui renferment des récits, des idées, des expressions propres à corrompre peut-être de jeunes imaginations !

Respectons jusqu'au scrupule, jusqu'à l'excès cette innocence des enfants, cette fleur de pureté des adolescents, ces saintes fiertés d'une candeur qui s'ignore elle-même et que rien ne doit ternir. Quand nous avons banni de notre conversation ce qui est positivement mauvais, nous croyons que cela suffit et nous nous trompons; à côté du mauvais il y a le grossier. On ne saurait croire combien une certaine distinction de langage et de pensées contribue à relever le niveau général de la famille. Les hermines évitent, dit-on, les endroits fangeux; on peut, sans tomber dans l'afféterie, observer une réserve de bon goût et ne pas toucher à la boue.

Nos enfants rencontreront plus tard ces choses, mais il est bon qu'ils sentent que chez eux on ne les admet pas. Le comme il faut s'acquiert auprès des parents, par la vue
habituelle de ce qui est noble, par l'exclusion de ce qui est bas. Le comme il faut ne s'enseigne pas et les règles n'en sont tracées nulle part; il se communique, il se gagne, si j'ose parler ainsi. Et n'allez pas croire que ce soit une acquisition sans valeur, il se rattache à l'ensemble de l'éducation, c'est-à-dire à cette influence mystérieuse et toute puissante que la famille exerce sur nous.

La famille ne nous enseigne pas autrement la complaisance, l'accomplissement aimable des devoirs de détail, le sacrifice de nos convenances. Cet apprentissage incomparable de la vie était là, tout préparé pour nous et autour de nous, au moment où nous sommes nés. Il y avait de vieux parents à soigner et à amuser, des malades à visiter, du bien à faire; il y avait des frères et des soeurs à supporter dans leurs brusqueries, des dérangements à accepter, des services à rendre. Notre famille s'est bien gardée, si elle a compris sa tâche, de nous épargner ces petites tribulations; elle n'a respecté ni nos aises ni même notre travail; elle nous a interrompus, elle nous a fait lever de notre chaise, elle nous a donné des commissions, et nous avons de la sorte appris sous le toit paternel ce que nous n'aurions jamais appris ailleurs....

C'est si beau, de vrais parents en présence du vrai devoir!

Ils se sentent faibles, que sont-ils pour de telles choses ? Forger des caractères, armer des coeurs pour les luttes, les douleurs et les joies de la vie, préparer des âmes pour l'éternité, qui leur donnera cela ? A quelle source iront-ils puiser assez d'énergie, assez de sagesse, assez de persévérance, assez de largeur, je ne dis pas assez d'amour ! Voyez les à genoux, le secret de l'éducation est là. Le soir, quand leur nichée est endormie, ils s'entretiennent avec leur Père céleste, qui est aussi le Père de leurs enfants.

De telles prières sont entendues. Je ne dis pas qu'on voit toujours de ses yeux l'exaucement préparé là-haut, mais la fidélité des parents chrétiens a de grandes promesses. Peut-être, après eux, le fils qui a mis tant d'amertume dans leur vie rencontrera-t-il une grâce imprévue. S'il lui était donné de remonter jusqu'aux causes, il verrait, bien loin en arrière, deux époux prosternés auprès d'un berceau.

L'action des prières dure longtemps. L'autorité des pères et des mères dure longtemps aussi. Sans doute il est un âge où elle ne s'exerce plus de la même façon; elle n'en subsiste pas moins, dans les bonnes, dans les vraies familles. Ne leur demandez pas, à elles, quel est le terme précis de l'éducation, quelle est l'époque de l'émancipation définitive, quel est le moment où le fils a le droit de dire: Je ne dépend plus en rien de mon père.

Il y a une indépendance indispensable; il y a une douce dépendance, dépendance volontaire que maintient l'habitude du respect. Aucun de ceux qui en ont senti le charme ne me démentira, si j'affirme que parmi les déchirements qui se font en nous lorsque notre père nous est retiré, un des plus douloureux est celui que produit cette pensée : Je ne dépend plus que de moi.









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