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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
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RETOURUne leçon de calme Le lac n'avait rien d'attrayant ce matin-là. Sa couleur verte, les «moutons» blancs qu'on apercevait au loin, le vent qui soulevait les vagues furieuses, tout promettait une traversée peu agréable. Pourtant, comment faire, quand on demeure sur l'autre rive ? il faut prendre son parti d'être quelque peu secoué et ballotté, si l'on tient à rentrer chez soi le jour même. C'est ce que nous fîmes, ma fillette et moi, mais à peine le bateau était-il sorti du port qu'un fort roulis commença à se faire sentir. Je regardai ma petite compagne de voyage; c'était sa première mauvaise traversée et elle n'avait pas l'air trop rassurée. Que ferai-je si elle prend peur, elle si nerveuse ? elle pleurera, elle aura le mal de mer et ce ne sera guère commode. Allons ! me dis-je, le calme est contagieux, tout comme la terreur; essayons de ce moyen. Regarde, dis-je à Lucie, regarde ces belles vagues ! Elles sont presque aussi grosses que celles de la mer, te souviens-tu de notre séjour au bord de la mer ? - Oh ! oui, maman, et te rappelles-tu la grosse vague qui nous avait attrapés, mon petit frère et moi, le jour de notre arrivée ? Papa nous avait ramenés à l'hôtel tout mouillés. C'est vrai que le lac a tout à fait la couleur de la mer aujourd'hui. Nous étions au milieu du lac, et le roulis devenait toujours plus fort; l'eau réjaillissait parfois sur le pont. - Maman, maman, comme le bateau balance fort ! me dit ma fillette avec un air d'effroi. - Mais, oui ! répondis-je gaîment; tu dois trouver cela très agréable, toi qui aime tant te balancer. Ce serait à moi de me plaindre, car je déteste les balançoires, mais tu dois en jouir beaucoup. Rappelle-toi comme tu refuses souvent de céder la place à ton frère, en disant: Encore un coup ! C'est aujourd'hui que tu peux dire: Encore un coup! En ce moment, le bateau cinglait vers la rive, non sans faire des plongeons inquiétants: Encore un coup ! encore un coup ! répétait ma petite compagne puis, soudain: - Oh maman, j'ai mal au coeur, je vais rendre mon déjeuner, il est déjà dans mon cou - Allons donc ! répondis-je; il y a longtemps que nous avons mangé, et je ne crois pas que ton déjeuner puisse revenir; sois sans crainte. Quelques minutes encore et nous entrions dans le port bientôt nous mettions le pied sur la terre ferme et ma petite Lucie ne se doute pas, à l'heure actuelle, qu'elle a fait une très mauvaise traversée; moi-même je me suis rassurée en la rassurant et je n'ai pas eu le temps d'être malade. Cette petite expérience m'a paru pouvoir être utile à d'autres mères; nous avons, en mal ou en bien, une immense influence sur le système nerveux de nos enfants; s'ils sont déjà nerveux par hérédité - et c'est parfois notre faute - veillons d'autant plus à ne pas accentuer cette disposition par la contagion de nos nerfs. Apprenons-leur à ne pas crier, à ne pas perdre la tête, à ne pas s'émouvoir pour des riens, nous leur rendrons ainsi un immense service et pour leur vie entière. - Ma fillette est comme moi, me disait un jour une maman, elle a peur du tonnerre. - Tiens ! lui répondis-je, mes enfants n'ont jamais eu l'idée d'en avoir peur. - Moi, je dis à Marguerite que c'est le bon Dieu qui gronde quand il y a de l'orage. - Ce n'est pas étonnant qu'elle ait peur, si vous lui mettez de pareilles idées en tête, lui dis-je. La plupart des terreurs qui hantent les enfants et leur font parfois tant de mal, leur ont été suggéres par des bonnes, des soeurs et quelquefois des mamans ignorantes du mal qu'elles faisaient ainsi. |
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