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Le sourire qui fait toutes choses nouvelles

Dans «Lettre à un otage», Saint Exupéry, l'aviateur écrivain français racontait qu'il fut arrêté en Espagne. C'était pendant la guerre civile. Il avait été envoyé là-bas pour un reportage et il assista, par hasard, une nuit, à un embarquement de matériel secret dans une gare de marchandises. On l'emmène dans un sous-sol transformé en corps de garde, on le fouille, tout cela dans un silence pesant. Saint Exupéry se demande si sa dernière heure est venue, mais il ne peut interroger, car il ignore le catalan, la langue de ces soldats. Mais quelque chose va se passer qu'il raconte en ces mots:

C'est alors qu'eut lieu le miracle. Oh! un miracle très discret. Je manquais de cigarettes. Comme l'un de mes géôliers fumait, je le priai, d'un geste, de m'en céder une, et ébauchai un vague sourire. L'homme s'étira d'abord, passa lentement la main sur son front, leva les yeux dans la direction, non plus de ma cravate, mais de mon visage et, à ma grande stupéfaction, ébaucha, lui aussi, un sourire. Ce fut comme le lever du jour.

Ce miracle ne dénoua pas le drame, il l'effaça tout simplement, comme la lumière, l'ombre. Aucun drame n'avait plus eu lieu. Ce miracle ne modifia rien qui fût visible. La mauvaise lampe à pétrole, une table aux papiers épars, les hommes adossés au mur, la couleur des objets, l'odeur, tout persista. Mais toute chose fut transformée dans sa substance même. Ce sourire me délivrait. C'était un signe aussi définitif, aussi évident dans ses conséquences prochaines, aussi irréversible que l'apparition du soleil. Il ouvrait une ère neuve. Rien n'avait changé, tout était changé. La table aux papiers épars devenait vivante. Les murs étaient vivants. L'ennui suinté par les objets morts de cette cave s'allégeait par enchantement. C'était comme si un sang invisible eût recommencé de circuler, renouant toutes choses dans un même corps, et leur restituant une signification.

Les hommes non plus n'avaient pas bougé, mais alors qu'ils m'apparaissaient une seconde plus tôt comme plus éloignés de moi qu'une espèce antédiluvienne, voici qu'ils naissaient à une vie proche. J'éprouvais une extraordinaire sensation de présence. C'est bien ça: de présence! Et je sentais ma parenté.

Le garçon qui m'avait souri, et qui, une seconde plus tôt, n'était qu'une fonction, un outil, une sorte d'insecte monstrueux, voici qu'il se révélait un peu gauche, presque timide, d'une timidité merveilleuse. Non qu'il fût moins brutal qu'un autre, ce terroriste ! mais l'avènement de l'homme en lui éclairait si bien sa part vulnérable ! On prend de grands airs, nous les hommes, mais on connaît, dans le secret du coeur, l'hésitation, le doute, le chagrin...

Rien encore n'avait été dit. Cependant tout était résolu. Je posai la main, en remerciant, sur l'épaule du milicien, quand il me tendit ma cigarette. Et comme, cette glace une fois rompue, les autres miliciens, eux aussi redevenaient hommes, j'entrai dans leur sourire à tous comme dans un pays neuf et libre.

Les soins accordés au malade, l'accueil offert au proscrit, le pardon même, ne valent que grâce au sourire qui éclaire la fête.









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