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L'enfant à qui l'on ne reproche rien

Il y a des enfants qui ne paraissent pas poser de problème, sans doute parce qu'ils ne gênent personne... Et pourtant, à côté des enfants dont les défauts témoignent d'une mauvaise adaptation à leurs conditions d'existence et à leur milieu, il en est d'autres dont l'adaptation, en apparence parfaite, n'est pas de bonne qualité, en ce sens qu'au lieu d' être un signe de vitalité et de résistance, elle témoigne plutôt d'un manque de réaction qui mérite que l'on s'en préoccupe. Le plus grand danger pour ces petits «modèles», c'est qu'ils soient encouragés dans leur démission par la satisfaction non dissimulée, les compliments et les récompenses des grandes personnes qui ne peuvent évidemment pas rêver de progéniture plus commode. Et pourtant; sous cette surface limpide et calme, couvent parfois des névroses sérieuses susceptibles d'éclore quelques années plus tard.

Evidemment, une docilité trop accentuée nuit en général à l'esprit d'initiative; à quoi l'on m'objectera peut-être qu'il vaut mieux manquer d'initiatives que d'en avoir de fâcheuses; et je conviens que l'esprit d'initiative n'est une qualité que dans la mesure où les initiatives sont bonnes. Un certain nombre de vertus ainsi ne valent que par leur contenu, tandis que d'autres valent par leur substance même. Si, par exemple, la bonté et la loyauté sont du second type, l'obéissance est sans conteste du premier. L'enfant à qui ses parents ordonneraient de commettre un acte délictueux ne saurait être blâmé de se montrer désobéissant. Tous néanmoins, jusqu'à un certain âge, prennent les règles édictées par les parents pour la loi suprême, même lorsqu'ils ne s'y soumettent pas; mais il est normal et nécessaire que, peu à peu, l'enfant se dégage de cette étroite tutelle. S'il continue sa vie entière à attendre aveuglément des autres ses directives, on peut dire que son développement moral est arrêté; il souffre d'une véritable arriération.

Que les éducateurs se méfient donc de l'enfant-modèle ou tout au moins d'un certain type d'enfant-modèle. En face de l'enfant «qui dit toujours non», il y a celui «qui dit toujours oui», non parce qu'il pense vraiment: «oui», mais parce qu'il ne se reconnait pas le droit sait de dire: «non», soit (ce qui est plus grave encore peut-être) de penser: «non». Pour les parents et les maîtres, la tentation est grande de se réjouir d'un caractère aussi aimable. Il y a déjà tant d'enfants-problèmes! Il y a tant d'enfants difficiles pour qui l'on se casse la tête à trouver des solutions ! Faut-il donc ajouter encore à la liste cette vraie «bénédiction du Ciel» qui paraissait de tout repos: «L'enfant à qui on ne reproche rien».

Oui, sans doute, car l'une des tâches essentielles de l'éducateur est d'ammener ceux qu'il élève à un stade d'autonomie. Quelques parents se récrieront: «Mais notre enfant est très indépendant. Nous le laissons d'ailleurs très libre». Ils ajouteront même quelquefois: «Allez, il n'en fait qu'à sa tête, et je vous assure qu'on n'en fait pas ce qu'on veut», car le manque d'autonomie n'exclut même pas forcément la révolte ni les troubles du caractère.

C'est qu'une confusion s'établit habituellement entre autonomie et indépendance; ou, si l'on veut, entre «indépendance intérieure» et «indépendance extérieure». Pour me faire mieux comprendre, je prendrai pour exemple de ces jeunes êtres privés de l'autonomie nécessaire à la vie, ces petits qui, lorsqu'un étranger leur demande s'ils ont faim ou s'ils ont froid, se tournent d'abord d'un air interrogatif vers leur mère pour savoir s'ils ont vraiment faim ou froid. En général, le coeur de la maman fond alors d'aise et de délices.

Le premier remède pédagogique qu'il est donné aux parents et aux maîtres d'appliquer, c'est de lutter en eux-mêmes contre le secret contentement qu'ils risquent d'éprouver devant une si touchante confiance et un tel degré d'appartenance. L'enfant perçoit bien l'élan de tendresse qui répond à la démission de sa pensée et de sa sensibilité personnelle; il s'en trouve ainsi payé. Le manque d'autonomie ne revêt pas toujours des aspects aussi frustes. Plus l'individu grandit, plus le mal se dissimule avec subtilité. Nous avons vu qu'il pouvait sourdre au plus profond de quelques pseudo-révoltés: car il en est qui, en réalité, se révoltent non pas tellement contre une chaîne imposée du dehors, mais contre la chaîne qu'ils ont en eux et que leurs colères et leurs violences n'arrivent pas à briser.

...C'est pourquoi nous ne saurions nous montrer trop attentifs, dès le plus jeune âge de nos enfants, à les inciter à exprimer leur opinion personnelle en nous gardant bien de les rabrouer ou d'ironiser devant certaines naïvetés. Il faut savoir se retenir de bondir à la première velléité de non-conformisme, même lorsqu'il s'agit de velléités maladroites ou manifestement absurdes. Ce qui n'est pas absurde, c'est la velléité d'échapper au conformisme absolu et d'affirmer sa personnalité. Toute opinion mérite une discussion honnête et calme, où le jeune interlocuteur ne risque pas de se croire vaincu d'avance uniquement parce qu'il est le plus jeune. Ce n'est certes point par des «Tu ne peux rien y comprendre. Tu comprendras plus tard, etc.», que l'on montre le chemin de la sagesse véritable et de l'objectivité.









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