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Le tyran

... C'est un vrai tyran; on ne peut pas appeler autrement un bambin qui abuse de sa faiblesse et qui devient le maître de la maison.

Voilà de ça un an, il a été renversé par une voiture en allant faire une commission: il a eu les jambes abîmées et surtout la hanche toute démise; elle ne se remettra que dans très longtemps.

Avant son accident, c'était un enfant ordinaire; il ne se mêlait pas de ce que faisaient ses parents et il n'avait pas des inventions hors de proportions avec son âge... Avant l'accident, les parents aussi étaient des parents ordinaires. Ils n'accordaient pas au petit garçon plus d'attention qu'il ne fallait; c'était des gens comme tout le monde.

Je dois dire qu'ils avaient un caractère à se chamailler, ce qui ne les empêchait pas de s'aimer à leur manière, car ils ne sont méchants ni l'un ni l'autre. Mais il suffit de si peu de chose pour qu'on se dispute entre mari et femme ! Eux, ils exagéraient un peu; ils criaient, c'était un plaisir; on savait tout ce qui se passait dans leur logement. Et je vous assure que souvent ils auraient été embarrassés pour dire le pourquoi de leur querelle; voilà, ils avaient eu une fois raison de s'attraper, alors un agacement leur restait, qui se reportait d'un jour sur l'autre.

Les parents ont éprouvé un grand chagrin de l'accident; ils ont été bouleversés, affolés, leur affection pour l'enfant s'est accrue de la pitié qu'ils ressentaient pour son mal; ils ont reconnu que l'enfant étaiit leur bien le plus cher et que la chose la plus importante du monde était de le dorloter, de l'aimer, de le soigner...

Cet enfant a senti sa faiblesse, il s'est aperçu que ses parents étaient son seul soutien, il les a regardés, il a pensé à eux autrement que ne fait un enfant bien portant à l'égard des siens...

Ses parents, la journée terminée, rentrent fatigués et par suite assez irritables. Pour le moindre motif, le mari crie après la femme, ou bien la femme cherche noise au mari; ça soulage, ça détend les nerfs. Au premier mot désobligeant l'enfant penche la tête sur l'épaule, et il prend un regard fixe, malheureux, navré. A mesure que la dispute continue, il pleure en silence, dans la même attitude, sans essuyer ses joues. Vous comprenez que bien vite cette intervention coupe court à la querelle; il faut se taire, que l'on ait tort ou raison, il n'y a pas moyen de faire autrement...

La soupe est servie.

- Eh bien, tu ne manges pas ? demande le papa au petit garçon.

- Non, j'ai pas faim.

Misère de chien ! Vous croyez que ce n'est pas abominable une tyrannie pareille ? Le mari pose sa serviette, se lève, va embrasser sa femme. Immédiatement le tyran met la main à sa cuiller et pour le reste du repas, il a de l'appétit à proportion des paroles aimables qu'il entend échanger.

C'est-à-dire que voilà des gens tout à fait matés, sous la dépendance d'un marmot de huit ans, qui ne sont plus libres de se conduire comme ils veulent chez eux ! Ils passent des journées entières, des dimanches sans une discussion. Qu'est-ce qye vous voulez qu'ils fassent ? Le mari fume sa pipe, lit, corrige les devoirs d'écolier; la femme coud, chante, fait réciter des fables. Ils causent. Ces deux grandes personnes sont condamnées à faire la causette avec ce gamin, à lui raconter je ne ses quoi. Lui, il détaille ce qu'il a vu par la fenêtre, au cours de la semaine.

Tout ça ne suffit pas ! Parfois, pour amuser Monsieur, le père cet la mère jouent comme des écervelés ou bien ils lisent ensemble le même livre puéril, tout haut, tête contre tête, ils se frottent la figure: tout à coup, l'un ou l'autre pousse un grognement, ils font semblant de se mordre.

L'enfant les contemple et il rit, il a l'air de dire: «Voilà pourtant où je les ai réduits !».

Je ne noircis pas à plaisir, je dis ce qui est: et la réalité est là, révoltante, désespérante: avec un tyran pareil, le père et la mère finiront par en prendre l'habitude; voilà des gens qui passeront leur vie à s'embrasser !









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