Accueil
   

 

 

 

RECHERCHES
Rechercher un mot dans les articles:


Recherche avancée
• par mots
• par thèmes

ARCHIVES DE TOUS LES ARTICLES



AUTRES MENUS
ACCUEIL
ADRESSES
  • Adresses utiles
  • Bibliographie
  • Liens Internet
LE JOURNAL






Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
En dehors du grand intérêt pour vous de cette matière exceptionnelle, que vous soyez jeune parent, chercheur dans une université ou simplement intéressé par l'évolution des comportements humains, votre soutien par l'intermédiaire d'un abonnement nous est indispensable.
Pour les pays lointains et si vous ne désirez pas profiter de la version papier, un abonnement sous forme de pdf est accessible au même prix annuel de CHF 30. Il vous donne un accès complet aux archives
RETOUR

Le respect

Soyons justes: cette envahissante jeunesse peut faire valoir des circonstances atténuantes. Au premier coin de rue, moyennant cinq centimes on peut se procurer des écrits qui ne sont autre chose qu'une provocation au mépris de toute autorité et de toute supérieure, sans parler d'une abondante collection de pensées ignobles et de récits nauséabonds. On va jusqu'à distribuer gratis aux petits écoliers des spécimens illustrés où se trouvent des gravures dignes du sujet, et qui parlent un langage suffisamment clair. Dans un pareil milieu, des aspirations élevées et généreuses exposent au ridicule ceux qui en font profession. Aussi, quand on n'a pas le courage de réagir, on se laisse aller au courant, on fait comme les autres, le sens moral décline, les liens de la famille se relâchent et le respect s'en va. On pourrait donner d'autres excuses, et, par exemple, la transformation, heureuse à tout prendre, de nos moeurs familiales, qui, dans la France moderne, a rapproché les parents des enfants, au grand bénéfice de l'intimité. Nos enfants nous tutoient, prennent place à la même table que nous, partagent nos distractions, vivent de notre vie ; cela vaut mieux sans doute, que la sévérité exagérée et la raideur cérémonieuse d'autrefois. Mais on peut se demander si nous ne sommes pas allés trop loin dans la voie d'une réaction légitime.

Notre affection pour nos enfants n'est-elle pas trop molle, trop faible, et, pour dire le vrai mot, entachée d'égoïsme? Ne les aimons-nous pas surtout pour nous-mêmes, nous amusant de leurs répliques et de leurs espiègleries, admirant leur petit talent de société, leur habileté a contrefaire les autres, et fermant les yeux sur les incartades pour ne pas « faire d'histoires? » C'est pour la même raison que la mère laisse parfois ignorer an père des choses qu'il devrait connaître, et accorde à l'enfant des suppléments d'argent de poche. C'est pour cela qu'elle se croit obligée à discuter, à plaider, à parlementer, pour obtenir de lui qu'il fasse ce qu'elle lui demande, et ce qu'elle devrait lui commander. Or avec les petits enfants, et même avec les grands, l'autorité qui négocie n'est plus l'autorité.

Aussi y a-t-il de petits enfants qui sont déjà fort mal élevés. Avant la sixième année ils traitent leur père sur le pied de la camaraderie. Ecoutez plutôt cette conversation recueillie à la sortie d'une école : «Pépère, m'as-tu apporté des bonbons? » « Ah ! mon chéri, j'étais trop pressé, ce sera pour demain. » Le père se penche pour embrasser l'enfant, un bonhomme de huit ans, mais celui-ci se dégage en s'écriant d'une voix perçante : « Alors je ne, t'embrasse pas ! » Le pauvre père par des paroles de consolation, s'applique à rentrer dans les bonnes grâces de son fils.

Si nous aimions nos enfants pour eux-mêmes, nous surveillerions davantage, ce qui se dit en leur présence. De même que nons écartons de leur régime alimentaire des mets qui nuiraient à leur santé, de même nous éviterons devant eux des conversations qui sans rien avoir de malséant, ne sont pas faites pour leur âge, ; qui risqueraient, par exemple, de déposer en eux des germes d'envie et de haine, de dédain ou de mépris pour les autorités et la société.

Aimer les enfants d'un amour égoïste c'est se préparer des déceptions. Plus tard, aux heures critiques de la vie, nous invoquerions en vain une autorité que nous n'avons jamais fait valoir. S'il arrive que, nos enfants nous aiment non pour nous, mais pour eux-mêmes, c'est-à-dire dans la mesure où nous facilitons leurs caprices ou leurs plaisirs, c'est, trop souvent, parce que nous leur en avons donné l'exemple.

J'excuse donc, dans une certaine mesure, les enfants mal élevés. Mais, je ne saurais assez dire à quel point je les plains! Que le laisser-aller provienne chez eux du mauvais exemple, ou de mauvaises lectures, ou de la faiblesse des parents, le résultat est le même, et il leur sera difficile de refaire leur éducation... D'ailleurs quand des garçons ont l'habitude de faire ce qui leur plaît, comment résisteront-ils aux entraînements? Quelle sauvegarde remplacera, pour le jeune homme, le respect de l'autorité qu'une éducation débilitée lui a laissé ignorer?...

Enfin, soit qu'il considère comme des ennemis naturels ceux qui ont autorité sur lui, soit qu'il les traite en camarades, cet écolier n'aura pas dans la vie la satisfaction intime de posséder en eux des amis respectés, aimés, et qui, eux aussi, l'aiment et l'estiment. En cela aussi, en cela surtout, il est bien à plaindre: il n'éprouvera jamais l'émotion, à la fois attendrissante et réconfortante, que donne le souvenir d'avoir honoré son père et sa mère et d'avoir reçu d'eux l'héritage sacré de leur bénédiction.

Je termine en allant au devant d'une objection. Parler aux jeunes gens de respect et d'obéissance, dira-t-on est-ce bien le moyen de former les hommes pour la liberté? Je réponds : C'est trop peu dire que le respect dans l'ordre familial, aussi bien que dans l'ordre politique, n'est pas incompatible avec la liberté ; il faut se dire qu'il en est la condition nécessaire. Il faut répéter après l'auteur de ces beaux livres qui s'appellent : Justice, Vaillance, Jeunesse, la Vie simple (1) : « Le seul moyen d'échapper à la servitude, c'est l'obéissance. » En effet, respecter les autres, c'est se respecter soi-même et apprendre à se faire respecter; c'est s'habituer à prendre conseil de sa dignité et à ne tenir compte que de son devoir. N'est-ce pas là se comporter en homme libre? C'est la leçon qu'ont donnée au monde au XVIle siècle, ces puritains si indomptables dont le nom provoque, en certains milieux le sourire, mais qui furent les fondateurs des États-Unis. Ils apportèrent sur ces lointains rivages, d'une part, leurs fortes convictions religieuses et leur ferme organisation familiale, c'est-à-dire le principe d'autorité; d'autre part, les principes de liberté qui ont fait la grandeur de la nation américaine, et dont l'Europe a reçu le contre-coup salutaire.

Le respect, on ne saurait trop le redire, est la condition même de la liberté. Ajoutons seulement que lorsqu'il s'agit de l'éducation, je dis l'éducation sérieuse, l'autorité paternelle se fait de moins en moins sentir et fait place, avec les années, à celle de la conscience.

C'est là l'autorité supérieure et permanente, devant laquelle l'enfant devenu homme ne cessera pas de s'incliner. C'est celle à laquelle a toujours obéi le père lui-même quand il donnait des ordres à son fils, ou lorsqu'il lui prodiguait les marques de sa tendre affection.

La conscience: ce mot nous rappelle à nous parents, que notre autorité implique une soumission. Nos enfants n'appartiennent pas seulement à nous, nous en devons compte à Dieu.

Respectons l'autorité suprême; aimons-la, servons-la. Cet exemple sera pour nos enfants au milieu des écueils de la vie, ce qu'est pour les marins dans la tempête, la clarté qui perce la brume et montre le chemin du port.

(1) C. Wagner.









www.entretiens.ch fait partie du réseau « NETOPERA - culture - société - éducation sur Internet » et pour la photographie PhotOpera - Uneparjour || DEI - Défense des Enfants - International
ROUSSEAU 13: pour allumer les lumières - 300 de Rousseau  ROUSSEAU 13: les IMPOSTURES - 300 de Rousseau - portraits déviés PHOTOGRAPHIE:Nicolas Faure - photographe d'une Suisse moderne - Le visage est une fiction - photographie de l'image brute - Laurent Sandoz - comédien et acteur professionnel - Genève