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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
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RETOURPeur et Energie La peur se manifeste sous des formes diverses suivant le caractère de chacun. Certains enfants, par exemple, bravent facilement un danger extérieur, mais ne peuvent affronter un reproche ou une raillerie. Notre devoir est de combattre la crainte qui veut envahir, ou qui a déjà envahi, l'âme de nos enfants ; car la crainte est pour l'âme une cause d'affaiblissement, d'esclavage et de tristesse. C'est une infirmité à laquelle les enfants sont généralement disposés, et pour la guérir il nous faut beaucoup de sagesse et de tact. Nous avons deux choses à faire : éloigner de nos enfants tout sujet de crainte inutile ou imaginaire, puis leur aider à acquérir cette possession d'eux-mêmes, qui leur permettra de supporter patiemment et avec courage les maux réels et inévitables de la vie. Si nous avons été témoins de la souffrance occasionnée par des craintes inutiles , des terreurs imaginaires, et des nerfs toujours vibrants, nous ferons tout pour préserver nos enfants de pareil esclavage. Autant que possible, nous éloignerons d'eux ce qui pourrait leur causer une frayeur subite ou terrifier leur imagination. Dans leur tendre enfance, nous éviterons, même en jouant, de les faire tressaillir par des bruits soudains ou des apparitions étranges. Nous ne raconterons pas devant eux des songes extraordinaires, des faits mystérieux, ou de nature à les inquiéter, comme l'histoire de meurtres, de vols, de morts subites, de chiens enragés, ou de terribles maladies. Nous ne permettrons pas non plus que de jeunes enfants voient un mort ou prennent part à une cérémonie funèbre, sauf dans des cas exceptionnels et absolument justifiés. Nous aurons soin de ne jamais paraître troublés à la vue d'un orage, quelque violent qu'il soit, ou à l'approche d'un danger. Nous saurons montrer du sang-froid en toute occasion. Nous ne témoignerons pas de dégoût à la vue de reptiles ou d'insectes que nous n'aimons pas voir trop près de nous. Nous ne laisserons pas à la portée des petits curieux des livres dont les histoires pourraient effrayer, à un degré quelconque, de jeunes imaginations. Soyons extrêmement vigilants dans tous ces détails. Il va sans dire que nous blâmons sévèrement la coutume d'obtenir l'obéissance des enfants en les menaçant du ramoneur, de croquemitaine ou d'un séjour à la cave, où les rats viendront les manger. Si de telles menaces sont prises au sérieux, elles font un mal très grand, en ébranlant le système nerveux des enfants, et quand ceux-ci ont découvert qu'on les trompe, leur confiance est détruite, ils se méfient désormais des personnes qui ont abusé de leur ignorance et de leur crédulité. Souvent on parle aux enfants d'un jugement, d'une punition que Dieu prépare pour ceux qui désobéissent, et s'il leur arrive un accident, on se bâte de l'interpréter dans ce sens. C'est leur donner une idée très fausse de nos rapports avec Dieu et les éloigner, par un sentiment de crainte , de la religion d'amour proclamée par l'Evangile. Répudions toute crainte superstitieuse comme un élément dangereux. Malgré toutes nos précautions nous aurons souvent à faire avec des enfants naturellement peureux, dont l'imagination sera difficilement calmée. Ne nous moquons pas de leurs craintes quelque déraisonnables qu'elles nous semblent. Ne blâmons pas non plus ces enfants et ne les forçons jamais, ni à entrer contre leur gré dans une chambre sombre ni à rester seuls, s'ils ont l'idée, qu'un danger quelconque les menace. Dans un cas pareil, le mieux est de ne pas paraître attacher d'importance à notre désir d'envoyer un petit messager dans une pièce à demi-obscure pour y chercher un objet, ou de le laisser seul un moment. Qu'il nous accompagne ici et, là, dans l'obscurité, jusqu'à ce qu'il y soit habitué, qu'il recherche une compagnie tant qu'il craint la solitude; peu à peu il se fortifiera assez pour oublier tout à fait ses appréhensions. Quelquefois, avec la pensée de corriger un enfant de sa pusillanimité, on lui raconte des histoires effrayantes de revenants, de sorciers; d'apparitions étranges, qui toutes se terminent par l'explication rationnelle, et toute simple des choses les plus extraordinaires. Cette manière d'instruire les enfants ne vaut rien ; car, si même on leur démontre clairement l'absurdité des récits qu'ils viennent d'entendre, leur imagination reste surexcitée, et ce n'est pas la raison qui aura la victoire sur leur sentiment. Ils paraîtront convaincus, mais ils ne seront pas rassurés. (A suivre) |
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