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(1992)
Papa,
tu m'entends ?
- Dis,
papa!
- Oui, attends... Tu te rends compte de ce que mon collègue
a osé me dire!
- Papa!
- Une minute, tu vois que je parle avec ton oncle. Ah! ce bureau,
quelle pagaille! Comment veux-tu que je continue dans ces conditions
?
- Papa, tu m'entends ?
- Oui, oui, je t'entends. Mais, c'est sérieux, ce que je
dis avec mon beau-frère. Pour une fois qu'on passe une heure
ensemble. Une heure qui va durer toute l'après-midi, comme
à chaque réunion de famille.
Michaël ne renoncera pas tout de suite. Il s'obstine, caresse
le bras de son père, tire un pan de son veston, essaie même
de grimper sur ses genoux.
Peine perdue. Les soucis du bureau, la jalousie des collègues,
les injustices du patron accaparent toute l'attention du père.
Pourtant, il l'aime bien, son fils. "Dommage qu'il ait pris
cette habitude de chercher à attirer l'attention quand il
se croit délaissé. Il est un peu collant, ce gosse,
en société."
Vous appelez ça collant ? Moi, je dirai qu'il recherche
le contact avec son père. Pas nécessairement dans
l'intention de perturber sa conversation passionnante. Mais parce
qu'il voudrait bien aussi avoir sa part d'échanges.
Pas question qu'on fasse de lui le centre de l'attention générale.
Mais lui accorder vingt minutes d'attention authentique, le temps
pour lui de vérifier qu'il n'est pas un objet sans valeur
perdu au milieu des adultes. Le temps de recharger ses batteries.
Ne laissez pas échapper ces précieuses minutes où
votre fils vous réclame. N'attendez pas qu'il ait seize ans
pour lui dire tout à coup: "Fiston, viens ici. Nous
avons à parler tous les deux."
Marguerite
Loutan
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