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(1993)
Maman,
tu viens jouer?
Cette
phrase rythme notre vie d’enfant, puis celle de parents. Combien
de fois l’avons-nous prononcée, puis entendue? Quelquefois,
elle tombe à pic, quelquefois elle dérange, mais toujours
elle interpelle.
Jouer avec mes enfants n’a jamais été mon fort,
j’avoue même que je devais plutôt me forcer!
J’ai toujours admiré ces mères et ces pères
qui se roulent par terre, qui jouent à saute-mouton ou à
cache-cache, marchent à cloche-pied ou courent la tête
en l’air pour guider le cerf-volant de leur progéniture.
Et tout cela avec entrain et joie.
Quand elles étaient petites, mes filles adoraient me convier
à leurs jeux. Nous avions instauré “l’heure
du jeu”, juste avant la sieste. Un moment où nous nous
installions par terre au milieu de leur chambre et sortions des
rayons quelques jeux “calmes”. Ou bien, elles me faisaient
jouer le rôle du bébé qui crie ou de la malade
qui subit piqûres et pansements. C’était un moment
fort attendu par les enfants, un peu “redouté”
par moi.
Autant j’aimais leur lire des histoires, leur organiser des
pique-niques, des jeux rigolos, des chasses au trésor ou
des rallyes à l’occasion d’anniversaires, des bricolages
et des heures de pâtisseries, autant entrer dans leurs jeux
m’était difficile.
Heureusement, pour cela, il y avait d’une part le jardin d’enfant,
l’école et les amis de passage, et d’autre part
la grand-maman, partenaire de jeu idéale. Avec elle, toutes
les fantaisies étaient permises. Un jour, même, à
la grande surprise des animatrices d’une garderie dans un grand
magasin, elle avait précédé sa petite-fille
de trois ans sur le toboggan, planté au milieu de boules
multicolores. Elle lui montrait ainsi que ce n’était
pas dangereux, mais au contraire rigolo d’atterrir sur ce parterre
mouvant. A septante ans, il fallait le faire! Elle savait se mettre
à la portée des enfants, entrer dans leur monde imaginaire
et le comprendre, créer des personnages, “faire pour
semblant” et jouer, jouer, jouer...
Devrais-je, moi aussi attendre d’être grand-mère
pour aimer et savoir jouer ainsi?
Françoise Grondahl
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